mardi 22 novembre 2011

Brèves de divan n°1 : Faut-il que je sois ami avec mon ado sur Facebook?



Cette rubrique afin de rebondir sur quelques réflexions glanées dans l’air du temps, entrant en résonance avec les champs de compétence de la psychanalyse. Aussi, dans ce cadre, je vous remercie de m’adresser des sujets qui peuvent vous  interpeller.

La première problématique que j’aborderai est la suivante :

Faut-il que je sois ami avec mon ado sur Facebook? 

C’est un sujet fréquemment posé que l’on entend dans différentes émissions de télévisons ou radiophoniques, et dans le secret de nos cabinets.

Rapidement et  techniquement, pour être « ami » avec quelqu’un, il faut d’abord ouvrir un compte Facebook, puis proposer à un autre adhérent de devenir « mon ami ». Celui-ci est libre d’accepter ou de refuser mon invitation. On peut, à l’inverse, se faire inviter en tant qu’ami et ce sera dans ce cas à nous de consentir ou de repousser cette proposition.
Pourquoi être ami avec un autre utilisateur ?
Cela permet ainsi d’accéder à toutes les informations qu’il a ajoutées sur le réseau social (photos, vidéos, états d’âmes, etc.…) et donc d’avoir accès en temps réel à toute contribution de l’utilisateur sur ce réseau (réaction à d’autres statuts, nouvelles photos, etc…), permettant de fait un espionnage autorisé .

Ainsi, nous nous placerons dans la situation où c’est le parent qui invite son enfant à devenir son ami sur Facebook.

Notre enfant ou ado peut difficilement refuser cette requête, soit pour des raisons économiques de confort matériel, soit de craintes de rompre un lien d’affection.  Il peut, à la limite, accepter le parent en interdisant l’accès à certaines informations, mais nous retombons dans la peur de la découverte de ce blocage, et des explications qui devront s’en suivre.

Nous voici donc projeté au plus intime du moi de nos adolescents.

Mais Diantre que nenni! Que chacun reste à sa place!

Nous n’allons pas leur proposer de s’immiscer dans l’intime de nos conversations professionnelles, financières, sentimentales!

Cela pose deux questions distinctes:

-       La place le rôle des uns et des autres
-       La confiance et l’autorité 


La place et le rôle
Actuellement les jeux sont souvent mélangés. Mai 68 est passé par là ! Mais les parents ne savent plus ce qui est de leur rôle, de leur devoir ou de leur responsabilité. Ai-je le droit d’interdire, de sévir ? Ce n’est c’est pas un droit mais une obligation. C’est le rôle rassurant, structurant qui nous est dévolu en tant qu’adulte éducateur et surtout parent. Il faut savoir montrer qu’une vie collective, sociale est structurée par des règles, des lois. Aussi, par exemple, quand nous sommes en voiture lorsque le feu passe au rouge nous n’allons pas tergiverser, nous nous arrêtons, ce réflexe intégré de règles nécessaires nous est salvateur.
Eh bien il en est de même pour de nombreuses convenances dont nous avons besoin et qui font que plus elles sont automatisées plus la vie nous est simple.

Ne nous méprenons pas, je suis un défenseur des droits de l’homme, du libre arbitre individuel, mais cela est autre chose. Nous avons tous besoin de règles de lois qui doivent protéger le citoyen ou l’individu.

Les parents sont bien sûr « autorisés » à faire preuve d’autorité. C’est leur place et leur rôle. Le reste est affaire de savoir faire et de pédagogie. Là encore, il faut se méfier des articles qui inondent nos magazines. Les conseils génériques ne sont que des repères de réflexion. La réalité est autre il y a  Moi  le parent, mon adolescent et le contexte du moment, c’est de la combinaison des trois que doit naitre la bonne réponse.

Pour en revenir aux réseaux sociaux, vouloir savoir ce que vit mon ado ne se traite pas ici. Ici c’est la part de leur intime .


La confiance et L’autorité.

Pourquoi aurais-je besoin d’aller vérifier ce qu’il vit sur Facebook ? Cela voudrait dire que les liens de confiance ne sont pas suffisamment établis pour que je ne sache assez d’eux qui ne mérite d’être vérifié?

L’affection bien posée doit permettre dans son expression une réciprocité qui fait que nous savons de l’autre suffisamment pour que la confiance soit établie.
Il y a, par exemple, parfois des sur-jeux qui peuvent frôler l’hypocrisie… Vous savez ces familles dans lesquelles tout le monde crie : « Qu’est ce que l’on s’aime ! », mais qui masque par exemple une ambiance délétère due simplement à la haine que se porte le couple parental ! Et in fine, chacun pour soi avec sa peine, ce qui fait que l’on se croise au sein du foyer sans se connaître.

L’affection, l’écoute bienveillante, notre qualité d’adaptation sont des principes simples qui permettent d’établir la confiance.

Alors pourquoi vouloir aller espionner sur des réseaux sociaux ?

Si nous en ressentons la nécessité, c’est : soit que l’on sent que quelque chose nous échappe, soit que nous ayons peur de quelque chose. Ces signaux sont importants car ils sont l’expression que notre vigilance de parent est en activité et que nous sommes donc de fait encore pleinement acteur dans la vie de notre ado .

Que faire alors ? Il n’y a malheureusement pas de recettes… À part le dialogue bien sûr, avec ses limites que nous lui mettons. Dire notre doute, nos craintes, mais sans montrer une fragilité qui dénaturerait notre message.

Dans l’alcôve de nos cabinets il est bien plus aisé de « déverrouiller » un surmoi coercitif que d’en fabriquer un !

En langage décrypté, les fameux rôles dont j’ai parlé dans lesquels ON nous a mis avec parfois une allégeance trop importante à toutes ou certaines formes d’autorité, créent un Surmoi (dont j’ai besoin, le réflexe du feu rouge) trop développé.

Par contre nos ados devant lesquels nous n’avons pas osé poser de règles vont avoir du mal à structurer leur Surmoi, et d’ailleurs malheureusement les différents problèmes de société dans les collèges et lycées le montrent.

Alors s’inscrire sur les réseaux sociaux uniquement pour comprendre mon ado NON, tout faire pour établir ou retrouver une authentique relation de confiance OUI.

Et puis ne poussons pas l’avarice continuons un peu plus notre réflexion.

Que faisons nous des parents adolescents ? Adultes certes, mais peut-être en quête de construction, qui au travers de ce que vivent leurs ados tentent sans le savoir de terminer leur parcours pour in fine devenir cet adulte qu’ils n’ont pas connu ou qu’ils ont craint ?

Il faut à tout prix éviter cette confusion , chacun à sa place . Je n’aime pas ce mot car il n’est pas analytique mais approprié ici : l’empathie. Celle-ci seule suffit pour que je me mette au niveau de ma fille ou de mon fils au delà de  l’idée que je me fais d’un plaisir partagé. Cela n’a ni beaucoup de sens, ni surtout d’intérêt dans et pour la structuration de mon ado, allant même jusqu’à le perturber.

Et puis toujours pas avare, il existe aussi ceci : mon ado qui me demande de venir sur ces réseaux pour l’aider à cheminer. Alors là Bingo , c’est l’idéal . Cela existe, c’est la complicité établie. Mais c’est hors de mon sujet : Faut-il que je sois ami avec mon adolescent sur les réseaux sociaux ?  Car dans cette configuration  qui parle d’espionnage ?

Une précision très importante : que nous soyons déclarés amis ou pas, il faut dans tous les cas préserver notre jeune des mauvaises rencontres qu’il peut faire sur ces réseaux. Comment peut-il être sûr que Fanny, qui échange avec lui ou elle, est bien une jeune fille de 15 ans et non un adulte aux intentions plus ou moins douteuses ?
De l’informer de ne pas dévoiler son identité, sa véritable adresse, et venir nous voir en cas de doute ou de confusion.
De ne pas utiliser sa caméra pour se montrer, pour se dévoiler sans avoir ces assurances, mais cela est plutôt le propre de certains réseaux style MSN.
Et puis aussi de ne pas écrire de propos sur untel ou untel, sans les assurer de ne pas écrire n’importe quoi sur les uns, les autres. Qu’il s’agisse d’amis, de connaissances, d’enseignants, il faut leur apprendre à assumer tout ce qu’ils écrivent.

J’en conviens mes propos sont volontairement « brutaux » notamment en utilisant les termes d’espionnage, mais j’ai souhaité forcer le trait  afin de montrer combien pétri de bonnes intentions, nous pouvons commettre certaines maladresses. L’échange avec nos Ados s’improvise au quotidien. Mais surtout, ne croyez pas, comme la vague des années 1970 nous forçait à le penser, que l’adolescence est obligatoirement un moment de rupture et de conflits avec les parents ! Combien de fois entendons-nous dans nos cabinets de profondes interrogations : « Mais je n’ai pas vécu ma crise d’adolescence, donc suis-je devenu adulte ?! »

Encore une fois et je vous ramène sur l’article La vie, une pièce de théâtre.  En effet, la « crise d’adolescence » est une étape effectivement très importante dans notre évolution, mais il faut la dédramatiser car quand tout fonctionne « normalement »  cette étape se franchit naturellement.

La crise de l’adolescence est politique. C’est dans les années 70 que les psy en ont beaucoup parlé, comme étant une évidence, une nécessité presque. Politique, car la structure de la société reposait à l’époque sur des modèles archétypaux d’autorité, où l’on parlait encore de patriarche, la famille fonctionnant comme une oligarchie à laquelle chacun devait se soumettre. Je force là encore le trait, mais je vous invite à consulter des reportages sociétaux effectués à l’époque.

 Restons dans nos rôles. Car dans ces rôles, ces postures, chacun s’y retrouve et l’adulte est celui qui peut guider, mettre des limites. Être Parent, c’est une responsabilité qui doit nous apporter.

Car croire en l’évolution, c’est savoir être.


1 commentaire:

  1. Ha! le fameux principe d'autorité! Et s'il était nécessaire à toute bonne insertion sociale? Le discours fondateur de Plessé est bien présent.
    PhG

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