samedi 24 décembre 2011

Faut-il croire au Père Noël?

petit clin d'œil à Pascal ;)
La notion et l’appellation du Père Noël sont arrivées au début du XXe siècle. Auparavant, où était-il ? Les traditions nordiques en parlaient, bien sûr, mais cela était encore un inconnu non-existant pour nous, ainsi que pour les sapins qui, en des temps moins prospères restaient sagement au fond de leur forêt. À ce propos quelle tristesse de voir ces jeunes pousse dépérir dès la première semaine de janvier.

Combien de sapins, combien de guirlandes, l’honorent et l’attendent ?

Au fait qui est-il?  De qui, de quoi s’agit-il ?

C’est un personnage légendaire, lié à la fête de Noël qui trouve ses origines dans le nord de l’Europe, dont la mission est de distribuer des cadeaux.

Distribuer des cadeaux! C’est donc là que repose la magie!

Même le sage le plus approfondi ne peut rester insensible au charme des cadeaux.

S’est donc organisé au XXe siècle, pratiquement en même temps que l’ère industrielle qui autorisait « l’humanité »  d’autres aspirations que celle simplement de vivre, de survivre, de se projeter au travers le fait de désirer avoir ! C’est ainsi que s’est créée la société de consommation, l’emprunt, le pouvoir d’acheter sans en avoir les moyens !

Le Père Noël serait donc le fruit de l’ère industrielle et du capitalisme ?



Vraisemblablement, oui. Nonobstant, il apparaît comme un mythe, et c’est cela que je souhaite traiter.

À quel âge ne doit-on plus croire au Père Noël ? 
Combien de fois dans mon cabinet ai-je entendu cette question ?  
Le mythe repose-t-il sur le mensonge ? 
Nous n’allons pas nous confronter aux religions, mais le Père Noël en a-t-il la prétention ?

Nous mentons donc en faisant, en laissant croire à nos enfants que ce Bonhomme qui peut apparaître sympathique existe. Vraisemblablement parce que nous aussi avons été dupés par nos parents !

Cela nous oblige donc à mentir, pour être conforme à nos vécus d’enfance ou  pour créer l’évènement que nous avons tant attendu.

C’est un mythe païen. En ce sens, il est unificateur car il permet au delà des religions de fêter, de partager un commun. Le Père Noël, serait donc un fédérateur. Mais quel fédérateur ! Il est quasi universel. Au delà de la frénésie d’achats qu’il oblige, il amène l’humanité au même moment à penser … aux enfants !

Le Père Noël s’intéresse aux enfants ? Par ces temps médiatiques, il en faut du courage et de la probité ! Eh bien oui, il  nous oblige à formaliser un moment de pensée et de réflexion organisé autour de nos enfants, en vendant à tous du rêve que le, les cadeaux idéalisés voient le jour. Cela a un nom que le bon sens a oublié : l’utopie.

Et si le Père Noël n’était finalement qu’une utopie utile et indispensable ?

Et si le Père Noël n’était que le prétexte à croire que mes souhaits les plus inaccessibles pouvaient l’être ? Nous avons tous besoin de cet espace du possible qui permet à l’utopie d’exister. Attention l’utopie est consciente, elle ne relève pas de la démence, mais permet à l’homme de rêver plus loin que le possible autorisé.

L’utopie est donc révolutionnaire, comme le Père Noël alors. Peut-être que ce Bonhomme que Coca Cola a peint de rouge en 1930 est encore la figure emblématique qui nous autorise cela.

Alors faut-il croire au Père Noël?  Chacun est juge.

Mais je vous rappelle que tous les Noël, il reste dans nos souliers un cadeau, juste un petit cadeau, impossible, improbable auquel personne n’a pensé.


vendredi 23 décembre 2011

Brèves de divan 2: Alliance et Fidélité


J’essaye de me concentrer sur le quotidien que je viens d’acheter, mais rien n’y fait. Dans ce restaurant à la table d’à coté, je ne peux échapper à la conversation de mes voisins. Tous les candidats de la campagne y passent, y repassent même avec tous les noms d’oiseaux que cela autorise : « Elle a trahi ses adhérents, c’est  une fausse alliance … »

« Tu parles d’une alliance, tu as vu comment il l’a trahie, il n’est pas fidèle ça n’est que des paroles … etc. »
                                                                                                   
C’est ainsi que cette discussion à laquelle je ne peux échapper me propose cette digression.

La campagne qui s’annonce réveille en nous des termes surprenants « d’alliance » et de « fidélité » que je vais tenter de développer car ce qui s’applique à l’individu peut l’être au groupe, et également à la société.

C’est tout d’abord la notion d’alliance qui m’attire. Faire alliance, quelle drôle d’idée, de concept ! Pour faire alliance, il faut être au moins deux. Le premier engagé c’est moi. Qui suis-je ? Pourquoi aurais-je besoin d’un accompagnement ?

C’est avant tout la notion d’identité qui apparaît. Vous savez, toutes ces cartes dans les grandes surfaces, les commerces, les clubs que je fréquente ou dans lesquels j’exerce une fonction, le parti politique ou le syndicat auquel j’adhère, ma voiture, mon style de vie observable à mes vêtements entre autres, le résultat scolaire de mes enfants, bref tout ce que je suis.

Cela, je l’ai construit, choisi ou voulu. La question de l’identité est celle de ma construction, revendiquée ou non. Que suis-je ? Qu’est ce que je représente aux autres ? Cette forme de conglomérat, c’est ce que je propose aux autres ou que les autres veulent que je sois (cf. la vie est un théâtre) et cela, à un moment donné.

L’identité peut être définie de différentes manières : sur un plan juridique notamment, d’appartenance sociale, mais en l'occurrence ce qui m’intéresse c’est celui qui est là, maintenant.

La notion d’alliance s’appuie sur celle de l’identité, ce que je suis possède des qualités que l’on peut répertorier aussi en suffisance, excès, insuffisance. Dans cet état d’être s’organisent des rapports aux autres qui vont de fait créer des alliances. Que je le veuille ou non, dans l’enfance, sauf danger extrême, il y a alliance avec mes parents et avec ma fratrie.

Peut-on se passer d’alliances ? Jo (qu’incarne Eric Canton dans le film Les Enfants du Marais) peut en être une forme d’expression. Une toute puissance incarnée ou tout du moins comme nous pouvons le croire  peut autoriser des attitudes autocrates qui confirmeraient la possibilité d’une abstinence d’alliance. Mais ne nous trompons pas, Jo termine en prison et brise sa vie.

La vie est donc faite d’alliances voulues ou pas. En fonction de ce que je suis avec mes valeurs, mes références vont donc s’organiser autour de moi de gré ou de force des alliances auxquelles je serais fidèle ou pas. Et bien il en est de même au niveau sociétal où par exemple les partis politiques sont obligés de composer avec la matrice dans laquelle ils évoluent.

Je suis parfois amené à des alliances avec ma grande sœur pour pouvoir sortir jouer avec mes camarades, je fais alliance avec cette grande fille qui terrorise la cour de récré afin qu’elle ne me prenne en supplique.

Nous voyons ici les limites de l’alliance, celle ci peut aller jusqu’à la compromission : à cette fille je peux lui donner mon gouter, un bijou, de l’argent! Mais Diantre jusqu’où va l’alliance ?

Je ne vais pas aborder ici la morale, mais cela y touche pleinement. Certains, sans sens moral, vont organiser l’alliance très loin et d’autres en sont incapables. Vous imaginez tous les développements que je ne vais pas traiter ici.

Vous le voyez, sur un sujet aussi simple nous sommes amenés a côtoyer la théorie de l’alliance qui  constitue la base, l’origine du structuralisme en anthropologie initiée par Claude Lévi-Strauss dans le champ de la linguistique —mais sur cela je reviendrai avec un article plus approfondi car la psychanalyse et Claude Lévi-Strauss ont beaucoup à dire —.

La fidélité se modélise dans le moi le plus intime. Elle est l’égal du mensonge, cela en est une expression constante.

Pour revenir à nos partis politiques en signant un engagement de programme, de réflexions, se pourrait-il que celui qui tient le stylo sait qu’il ne suivra pas ce qui l’engage?

Si c’était le cas … La politique échapperait elle à la morale ?

Et puis nous simplement dans notre vie , l’exemple l’image la plus simple celle de l’union que nous pouvons envisager avec un être qui nous est cher , tout cela repose sur l’idée de la probité que nous développons ou non , certains considèrent qu’une petite aventure n’est que fortune de passage , alors que pour beaucoup d’autres il s’agit d’une trahison , d’une rupture au contrat et donc à l’alliance .

D’ailleurs pourquoi porter à l’annulaire un anneau ? Pour rappeler, car il doit en avoir besoin, que cette notion d’alliance est fragile et précaire.

Quelle est la valeur de la fidélité? Où se place le curseur de la rupture de l’alliance?

Tous les jours, dans notre quotidien, nous sommes amenés, embarqués dans des jeux de séduction plus ou moins affirmés que parfois certains autorisent à aller très loin : un flirt, un déjeuner, ou plus.

Alors qu’en est-il de nos partis politiques? Finalement sont-ils aussi inhumains que nous?

dimanche 4 décembre 2011

Le jour où ça a changé



Cette nouvelle rubrique, pour expliquer simplement comment notre vie peut instantanément basculer sur un acte violent ou banal ou sur une série d ‘accumulation ou d’incompréhension.

Ce qui vient à évoquer ce que sont les modèles effecteurs chers à la psychanalyse, et que je développerai dans un article futur.

Combien notre vie, celle des proches que nous observons, est émaillée de ces jours souvent terribles, parfois remarquables où le jour, l’instant d’après n’est plus le même, où je ne suis plus le même à.. Jamais ?  Pas si sûr.



Le jour où ça a changé -épisode 1-


- Ce mardi 8 Octobre, Mme Robert et Jeremy son fils de 15 ans se disputent  fortement à propos d’une broutille d’ailleurs, comme toujours dans ces cas là. Jérémy part à 7h30 en claquant la porte prendre son scooter pour aller au lycée à 15 Km de leur domicile. Madame Robert rumine son agacement tout en vaquant à ses occupations matinales, lorsqu’à 9 h, un coup de sonnette la ramène brusquement dans la réalité. Elle voit en ouvrant la porte du vestibule deux gendarmes l’air grave,  la regardant tristement. Instantanément son corps sent quelque chose. Elle esquisse un sourire et avant de dire quoique ce soit, le gendarme le plus âgé lui dit : « Madame Robert j’ai une nouvelle grave. Pouvons-nous entrer ? ». Il est arrivé un accident à Jeremy. Madame Robert parvient juste à s’asseoir.  « Un accident grave ? » bredouille t’elle, et le gendarme qui ne sait mieux répondre, dit : « Un accident de scooter à trois kilomètres d’ici, il n’y a plus rien à faire, les pompiers et le Samu n’ont rien pu faire. »


- Jean, 8 ans, bon élève habituellement, en classe de CE2, assis au premier rang, attend non sans anxiété le remplaçant de son instituteur parti subir une légère intervention absent deux semaines. La porte de la classe s’ouvre, le directeur présente une femme : « Voici Madame Ardouin votre nouvelle enseignante, vous pouvez vous rassoir ». Aussitôt, Jean se sent mal à l’aise. Il a chaud, mais ne sait pourquoi (Peut-être est ce le parfum qui ressemble à celui de patchouli qu’utilise à forte dose cette grand mère qu’il n’aime pas ? Et puis elle a le même chignon qu’elle, mais cela, il ne le pense pas encore) Madame Ardouin s’installe, puis dit : « Je vais faire une petite évaluation de votre classe en vous posant quelques questions. » Jean habituellement, aime bien cela avec son instituteur. Il ne voit pas venir la première question, c’est Martin qui y répond brillamment. Aussi, il se précipite en levant automatiquement le bras, mais trop vite : il n’a pas tout compris. C’est une question de géographie, il répond au hasard, ce qu’il ne fait jamais. Madame Ardouin se campe devant lui en riant très fort, et en apostant la classe : « Mais regardez moi celui là, c’est le cancre de la classe ou quoi ? Il dit n’importe quoi! Comment tu t’appelles ? Jean ?  et bien je peux te dire mon pauvre petit que tu n’iras pas loin dans la vie .


-Julia, 6 ans, comme tous les vendredis soirs, attend son Papa avec impatience. Elle a bien rangé sa chambre, au cas où il viendrait jouer avec elle. Elle sait qu’il est fatigué de sa semaine de travail, occupé qu’il est avec son métier de commercial à parcourir les routes de toute la région. Comme tous les vendredi, elle s’est mise à la table de la cuisine avec ses crayons de couleurs, pour lui faire encore le plus beau dessin de sa vie. Elle y met tout son cœur, et cela se voit à travers l’éclatement de toutes les couleurs. Ça y est, elle voit, perchée sur la chaise de la cuisine, la voiture qui enfin se gare sur le parking de l’immeuble. Des minutes très longues, puis enfin Papa entre avec ses deux valises. Elle se précipite dans ses bras comme tous les vendredi, lui glisse le dessin dans la main. Comme d’habitude : « Salut ma puce », dit il en l’embrassant, puis il se dirige vers son épouse qu’il enlace, en déposant sans le regarder, comme tous les vendredis soirs sur la table de la cuisine, le plus « joli dessin de sa vie »  de Julia. Samedi matin elle l'a vu "le plus joli dessin de sa vie"... Dans la poubelle de la cuisine, et chiffonné! Et ce jour n’est pas le même, plus jamais le même! Aujourd’hui, elle l’a vu. D’ailleurs Depuis elle ne fait plus le plus « joli dessein de sa vie»  et plein d’autres choses non plus…

Madame Robert, Jean, Julia, comme nous d’ailleurs, ont vécu un jour où ça a changé. Il y en plein des jours comme cela où nous ressortons le lendemain différents. C’est là que s’organisent les modèles effecteurs, qui nous imposent des comportements qui ne sont pas de réels choix et auxquels nous ne pouvons réellement changer, échapper ou alors au prix d’efforts incommensurables qui ne peuvent tenir la durée temporelle. Ces comportements peuvent devenir pathologiques, névrotiques  et c’est le domaine privilégié de la psychanalyse de les identifier pour les faire disparaître ou les atténuer.

Qui a le plus souffert ? De quel droit, et comment peut-on hiérarchiser la souffrance ?

Les souffrances qui en résultent peuvent surprendre le quidam dans les conséquences qu’elles organisent. De nos trois histoires réelles, il est surprenant de voir comment l’inconscient s’est réorganisé autour et ce que cela a généré !

Madame Robert, Jean, Martin, Julia, sont bien évidemment des appellations d’usage et ne peuvent en aucun cas rappeler qui que ce soit, même si cela s’est revécu sur mon divan .