mardi 25 décembre 2012

Précis de Psychanalyse Active



J’ai rédigé un Précis de Psychanalyse Active afin d’expliquer, de recentrer ce qu’est réellement la Psychanalyse Active. Il s’agit bien de Psychanalyse, et celle ci trouve ses racines dans les fondements de la Psychanalyse historique notamment au travers les travaux de S Freud et S Ferenczi.

La diffusion de cet ouvrage est pour l’instant interne. Il est à ce titre destiné aux Psychanalystes en exercice,  membres du CSDPA dont j’ai l’honneur d’être le Président,  dans le cadre de la formation continue. Il sera diffusé, si toutes les configurations le permettent à partir de septembre 2013.

En effet la Psychanalyse Active revendique dans son essence, dans ses fondamentaux le concept d’évolution constante, elle n’est pas figée, elle est constamment dans l’adaptation, au contact des réalités sociologiques ou structurelles, et cela vraisemblablement la différencie des sociétés de psychanalyse «passive » plus amenées à reproduire et à réexpliquer les travaux de tel ou tel.

Dans ce Précis je "reprécise" ce qu’est la Psychanalyse Active, d’où elle vient historiquement et conceptuellement, rappelant constamment que nous sommes bien dans le cadre « classique «  de la Psychanalyse.

Ce précis est accompagné d’une nouvelle méthode, destinée à la formation des psychanalystes du CSDPA, et de tous les psychanalystes praticiens qui demandent à nous rejoindre.

Ce précis accompagné de la méthode qu’il sous-tend développe dés aujourd’hui des analyses de haut niveau d’intensité. Que celles ci soient à finalité thérapeutiques ou didactiques.

Ce haut niveau d’intensité sera possible dés janvier 2013 avec moi, dans mon cabinet Nantais, et très rapidement au siège du CSDPA à Paris, pour être ensuite actif dans d’autres agglomérations dans lesquelles nos psychanalystes sont en exercice.

Je vous remercie de continuer à réagir sur les propos que ce blog exprime. Maintenant que le Précis est rédigé, le blog va retrouver toute son expression.

Je vous remercie aussi et surtout pour l’intérêt que vous portez à la Psychanalyse Active, les articles qui constituent le fondement de ce blog vont réapparaitre très prochainement.

Je vous souhaite de bonnes fêtes de fin d’année .

Très sincèrement Jacques Rivalin.

lundi 17 septembre 2012

"Ça passe vite, une vie."




" Assis sur le banc de la propriété familiale, je repense à tous ces moments depuis mardi lorsque Papa m’appelle.

Je comprends dans la confusion que maman est morte, lui pas encore, dans ce qu'il
me décrit, je lui dis précipitamment appelle les pompiers, je suis à ce moment occupé à refaire une chambre. Après une douche sommaire les pompiers sont là, Maman n’est plus visible, emportée par la maladie son cœur a cédé.

Tout a été vite, le médecin légiste, les pompes funèbres. Nous savions que Maman
était malade mais de là à ce que cela arrive aussi rapidement....

Je suis donc là assis sur le banc de la propriété familiale avec ces images immédiates violentes rapides déposantes. Papa arrive, il est ailleurs, ses yeux expriment ce que je n’ai jamais encore suffisamment vu en lui, la tristesse, la colère, la peur.

Je lui prends simplement la main, dans la famille, nous ne savons pas faire autrement et nous ne parlons pas. Finette le chien des voisins que nous affectionnons se campe simplement là.

Puis Papa me dit : "Tu sais Laurent, une vie ça passe vite"

J’ose à peine le regarder dans les yeux qu’il a d’ailleurs dans une narration intime que je ne peux ni ne veux percevoir. "

Laurent était en analyse avec moi lorsque sa Maman a été emportée. Lui s’attendait à la disparition de sa mère, le travail d’analyse lui a permis de faire, de terminer le travail de deuil avec sa Maman.

C’est plus moi à partir de ces réflexions et phrases qui ai souhaité vous faire partager ma lecture.

Cette phrase : "ça passe vite une vie" m’a interpellée car elle nous ramène au cœur du vivant, mais essentiellement au centre du travail psychanalytique.

Cela nous ramène a des réalités simples toujours associées à la mémoire car la vie qui nous appartient elle est liée à la mémoire et aux souvenirs. Quand nous sommes pleinement dans le vivant et surtout dans l’action celle ci n’apparaît pas dans nos préoccupations. La vie est indicible pleine et belle par sa vivacité, sa naïveté aussi... Nous ne nous rendons pas compte de ce qu’elle nous donne, dans son quotidien ferme et plein d’émotions petites pleins de joies, de tristesses, de colères, mais surtout pleines d’espoir.

"J’aime la vie quand elle rime à quelque chose" Dit Claude Nougaro. Moi j’aimerais dire "J’aime la vie tant qu’elle est là, car elle est !"

Une vie ça passe vite, cela renvoie à la perception du temps. Nous sommes inégaux face à cela, les organismes vivants n’ont pas le même rapport au temps, en fonction de leur structure.

Dans nos cabinets nous sommes tellement amenés à recevoir des patients qui sont passés à coté de cette beauté dont la nature nous a fourni. Leurs souffrances malheureusement ont pris le pas sur la réalité du vivant, et ceux ci ont pu vouloir attenter à leur vie.

Quel échec, quelle souffrance. Nos sociétés ethnologiques sont inégales aujourd’hui plus que jamais face à cela. Nous occidentaux avons favorisé une qualité matérielle dont nous ne pouvons pas nous plaindre sauf si celle ci altérerait Gaïa, avec une perception du temps de vie essentiellement productif.

Dans mon cabinet, j’entends depuis des années  "Mon Grand Père était en pleine
forme et après quelques mois de retraite il est décédé". Tout le monde bien sûr s’entend à
dire que ce dernier avait mal préparé sa retraite !

Une vie c’est court cela s’entend depuis l’âge de compréhension !

Quel drame que de dire cela, car effectivement dès tout petit enfant je sais au fond de moi, intimement ou pleinement tout ce qui va se passer ! Rapidement, les drames familiaux, les antécédents familiaux (qu'elle me lâche cette famille) je suis dedans, j’ai beau faire : par ignorance, soumission, rébellion ; je baigne dedans, font parti de chacun.

Le moment où nous prenons conscience et perception du temps et très variable. Ceci est malheureux pour le Psy de constater ces différences d’appréciations. Là encore le temps biologique est le même pour nous être humain, comment cela se fait il que certains disent ne pas être sensible au passage du temps alors que d’autre si ?

Cela est bien évidemment le même temps avec la rudesse plus ou moins des uns des autres.

Alors comment considérer qu’une vie passe vite ?

Nos empreintes, les phots ou les vidéos. Cela représente l’envie de se positionner par une datation dans de temps. Certains passent leur temps à le faire gage de réassurance permanente que le temps passant ils sont volés de quelque chose, mais surtout incapables par leur non maîtrise d’être simplement.

Une vie passe vite !

Deux approches : Celle vécue avec mes parents, en gros tout d’avant
Et l’autre : celle que j’a construit en tant qu’adulte.

Je vous rassure, les deux sont les mieux.

Enfant, vous vous en souvenez assurément le temps est long, c’étaient les jeudis, les mercredis après midi interminables, les longues vacances d’été.

Cela est mémorisé par chacun par des pointeurs temporels tels les fêtes Noël, anniversaires, autres, etc. Le temps dans ces moments n’a pas de matière, pas de quantité c’est la mémoire qui nos en donne l’accès, pas la conscience, vous le savez (je le redirai) elle n’est pas fiable, mais celle des souvenirs accessibles inaccessibles de la mémoire inconsciente.

Ces moments, ces piles "mnésiques" que je redéfinirai plus tard ne prennent pas de valeur temporelles. Aussi quand je vis, je ne pense pas à ce moment vécu, j’assimile simplement ce moment et le stocke en mémoire neutre inconsciente.

Aussi, construit de ces moments qui sont hors du temps, je suis moi même la conséquence de ce que mon inconscient produit.

Pourquoi le temps passe aussi vite ? Et surtout une vie ?

Par le décalage entre la réalité et le désir d’être.

La réalité est atemporelle, elle se fiche du temps et de vos désidératas elle est neutre, juste neutre. Le désir d’être est lui temporel et affectif, les deux cohabitent en permanence, mais ne sont pas amis, l’un trace, l’autre demande.

Cela veut dire que nous n’avons pas su dire , pour nous , simplement savoir , marquer ces petits moments d’harmonie , de bonheur que nous n’osons nommer, dire "je t’aime" , "je suis en désaccord avec toi" , en bref tout ce qui relève de l’affect .

Et cela tant que nous ne saurons pas le faire fera qu’à chaque fois d’aucuns diront "tu sais une vie ça passe vite."

Mais au quotidien cela se passe comment ?

Ce matin je me réveille de mauvaise humeur, avec mon conjoint l’intimité ça me gave, l’anniversaire de.... Je ne raconte même pas !

Cela veut dire apprendre à saisir la réalité du moment présent offert à nous, il ne s’agit pas de faire naître une béatitude stupide, mais quand j’ouvre ma fenêtre que ce soit à mon domicile ou sur mon lieu de travail, savoir humer pleinement l’air du temps. Savoir aussi hiérarchiser réellement ce qui à du sens dans une journée, ne pas tout prioriser par exemple simplement sur le plan professionnel.

Savoir apprécier ces moments gratuits d’une rencontre fugace, d’un sourire.

Savoir éviter les vécus du genre : En vacances sur un mois, la première semaine est fichue je pense à mon travail, les 15 jours au milieu ça va j’arrive à me détendre, la dernière semaine j’angoisse.

Eh bien oui la vie c’est cela, c’est simple, si, et si tout le reste est là.

Cela me ramene à un autre article sur le droit à la psychanalyse.

"La vie est courte pour l’homme heureux." Pierre Larousse

dimanche 2 septembre 2012

La rentrée m’angoisse.





Combien de fois entendons nous cela dans nos cabinets, combien de fois d’ailleurs cela motive une démarche chez le psy.

Je pense que nous pouvons en appréhender trois axes qui ne sont pas de même nature :
- L’un historique.
- L’autre conjoncturel.
- Le dernier plus philosophique.


- L’axe historique reprend simplement les principes de la psychanalyse, à savoir la façon dont je me suis construit se rejoue, à travers des comportements répétitifs plus ou moins conscients, plus ou moins maîtrisés. Ainsi vont donc se proposer à nous adulte à l’approche de la rentrée professionnelle, sociale, les réminiscences de celles que nous avons connu enfant. Pour certains cela sera la "joie"  de retrouver des lieux , des amis , des têtes , des challenges, et pour d’autres de retrouver le mal de ventre, l’envie de vomir, des difficultés à l’endormissement .

Ces entrées scolaires ont beaucoup plus d’importance que nous parents nous leur accordons, limitant notre vision souvent à la perte de l’être cher pour les premières entrées en maternelle notamment. En réalité chaque rentrée est un rite de passage. L’entrée en maternelle bien sûr, puis surtout l’entrée en CP, où l’enfant quitte le maternage de la petite enfance pour percevoir celui de la productivité que l’on va lui demander, il faudra avoir de bons résultats de bons classement et nous voyons des petits de 6 ans totalement effarés de cette pression qui peuvent s’enfermer dans des comportements anxiogènes handicapants.

L’entrée au collège puis au lycée en est autant. Nous sommes donc façonnés par ces expériences et même si la raison, ce conscient, qui veut nous faire aller de l’avant en positivant chaque rentrée professionnelle, nos vieux démons reviennent au galop et peuvent ainsi s’organiser des peurs indéfinissables, et ce qui est pire de véritables angoisses paralysantes filles de celle de nos enfants introjectés.

Pour revenir à nos souvenirs de rentrée, il faut remarquer que les enfants de nature anxieuse, angoissée, souffrant d'une mauvaise estime de soi, sont plus effrayés par cet évènement. Ces individualités plus vulnérables régissent moins bien des obligations de performances, ce qui peut amener rapidement des difficultés d'apprentissage ou de concentration. L'approche relationnelle avec les camarades d'école, ou les professeurs va ainsi devenir des freins et non pas des soutiens et encouragements. Ainsi  un sentiment d'insécurité ou d'angoisse s’installe et peut ne pas quitter l’enfant.
Si ce modèle effecteur est le notre nous ne pourrons pas échapper au coté et caractère répétitif de cet élève angoissé que nous étions, et la meilleure volonté du monde pourra vouloir nous faire minimiser cela mais … Il y a des limites.
C’est pourquoi je vois certains analysants me dire "mais je ne comprends pas, mon conjoint a tout pour être heureux dans son travail, à chaque rentrée c’est la même pantomime, il me fait le coup du mal de tête de ventre, d’angoisses, ne dort plus" …
- L’axe conjoncturel.
Rappelons de notre capacité à prendre de grandes résolutions l’année prochaine je repeindrai la cuisine, j’aurai mon bac j’irai fleurir la tombe de tante Estelle. Celles du jour de l’an imprégné d’effluves du réveillon sont pleines de solennité mais aussi pleines de vapeurs et de brouillard, alors cela fait vite parti du folklore, Ça s’oublie. Mais il y en a d’autres qui sont plus inquiétantes, celles que l’on esquisse un peu en juin, et dont on s’est tellement persuadé tout l’été qu’en août on gave tout le monde, a la rentrée j’arrête de fumer, de boire, je fais sérieusement un régime, je fais du zèle auprès de mon chef pour lui demander une augmentation …
Ces intentions louables, nous le savons sont difficiles à mettre en œuvre, elles font appel à de la privation, demandent de prendre sur soi, de renoncer à certaines paresses. Et aussi simple, nous nous mettons en état psychologique de crainte de ne pas réussir, de décevoir nos proches de ne pas y parvenir.
J’ai remarqué que nous sommes très structurés par la notion de rentrée scolaire qui marque une étape, un changement, un tournant, une évolution, plus que par celle du changement d’année, et qu’il y a un blues quasi naturel associé à cette période de rentrée.
Et puis aussi la rentrée pour tout être normalement constitué et relativement équilibré c’est passer d’un état de farniente, entouré souvent d’êtres chers, dans des activités souvent ludiques, à un état de retour au travail au social pour retrouver un univers ou l’objectif est la rentabilité, l’obtention d’un diplôme, du permis de conduire etc.
Et c’est rare que la rentrée soit pour ces raisons d’agrément vital un élément festif.

- L’axe philosophique.

Je dois avouer que c’est une petite pirouette, mais qui a mon sens n’en est pas dénuée.
Si je dois rentrer c’est que je suis donc sorti !
Sorti du système, des horaires, du cadre social, des obligations !

Où fini le monde de la conscience commence celui de l’extérieur. N’oublions pas que le conscient structure de façon synthétique notre pensée, notre façon de voir, le conscient façonné d’un surpoids de Surmoi n’a plus de conscience.
Avant la rentrée une forme large de liberté nous permet d’agir librement, sans contrainte. Pour Kant dont la réflexion est très proche de celle de Platon à ce sujet, la liberté ne signifie pas indépendance mais autonomie, c’est à dire la capacité à se donner à soi même ses propres lois. N’est ce pas une excellente définition de ce que les congés nous apportent ?
Cette période particulière que nous offre les vacances surtout celles de l’été permet de retrouver l’homme dans son état le plus naturel, d’ailleurs pour certains dépouillés de tous vêtements pour un retour à la nature, au rythme des marées, des cycles lunaires.
Le mythe de l’homme sauvage a d’ailleurs fait couler beaucoup d’encre.
       La rentrée porte en elle même cette appellation bien singulière, assez joué il faut rentrer !
Rentrer dans le rang, dans le moule, dans la classe, dans le bureau, à l’usine !
Bref tout sauf dehors. Nous avons tous en nous un aspect libertaire propre à nos premiers instincts grégaires alors quand la cloche de la rentrée a sonné, il faut remettre l’uniforme !

Alors si votre enfance a été jalonnée de rentrées calamiteuses, si vous avez juré de perdre 10 kg, d’arrêter de picoler, d’aller fleurir la tombe de la tante Estelle, et si de plus vous n’aimez pas être enfermé, je vous conseille une boite de bonbons au miel, ou  de trouver un très bon psy !

" De la forme nait l’idée"    Gustave Flaubert.

Sous les pavés …   La plage !

mardi 1 mai 2012

Empathie et Compassion



Quelles exigences ! Simplement dans l’idée de parcourir le champ d’application de ces deux mots. La psychanalyse y est confrontée en permanence.
En effet, l’empathie et la compassion côtoient, frôlent les champs d’investissement de la psychanalyse, dans son domaine d’application. Pour en simplifier l’approche et la compréhension, il est utile d’en rappeler le sens que le Littré en donne :

« - Empathie : faculté intuitive de se mettre à la place d’autrui, de percevoir ce qu’il ressent. »

« - Compassion : sentiment de pitié qui nous rend sensible aux malheurs d’autrui, pitié, commisération. »

Chacun conçoit ainsi que cela peut et doit toucher le domaine de la psychanalyse.

Cela est autrement plus complexe. Que le fait religieux soit amené, et « obligé »  à s’exercer dans les domaines que ces deux mots requièrent semble inévitable. À savoir : de la capacité à se mettre à la place d’autrui, et dans le même temps d’avoir l’aptitude d’avoir un sentiment de pitié et de commisération. Est-ce que cela veut dire que l’officiant prenne la peine de la famille, par exemple, à son compte ? C’est la où repose ma réflexion.


En réalité, ces termes relèvent d’un domaine bien singulier, et c’est pour cette raison que leur approche n’est pas spontanée et immédiate. C’est le domaine de la morale.

La morale est un ensemble de principes de jugement, de règles de conduites relatives au bien et au mal, de devoirs de valeurs, souvent érigés en doctrines, qu’une société se donne et qui s’imposent tant à la conscience individuelle que collective. Les conditions de vie, la culture, les croyances dominantes, organisent ce qui relève de la spécificité propre à la morale. Il est intéressant, à ce sujet, de s’autoriser à intégrer que ce qui à ce sujet nous a été plus ou moins introjecté est de fait relatif !

Pour rester dans ce domaine par rapport à la compassion il est intéressant de voir par exemple ce que nous dit Schopenhauer :

Un soir où il se promenait avec son ami le D Gwinner, celui-ci observant le ciel dans lequel les étoiles brillaient lui posa la question : « N’y a-t-il pas des êtres vivants, mais doués d’une existence plus parfaite que la nôtre ? » Schopenhauer lui répondit qu’il n’y croyait pas puis lui dit : « Croyez vous, qu’un être supérieur à nous voulut continuer un seul jour cette triste comédie de la vie ? Cela est bon pour des hommes, des génies ou des dieux s’y refuseraient. »

Cette réflexion résume la pensée de Schopenhauer : dans ce monde mauvais où la douleur corrompt toute joie, où la mort a le mot définitif, quel sentiment peut éprouver l’homme raisonnable et sage ?

En un mot : l’homme doit en arriver à donner accès dans son cœur à la sympathie. C’est le sentiment moral par excellence, ce lien par lequel nous sentons que nous sommes frères. Éprouver de la compassion, c’est donc ainsi devenir un être Moral. Une compassion sans borne à l’égard de tous les êtres vivants, cela ressemble à s’y méprendre au message Christique ! La base de sa morale est: la sympathie vive, ardente, se traduisant en pitié, en charité affective.

L’empathie.

Le terme a été crée par le philosophe allemand Robert Vischer pour désigner le mode de relation d’une personne avec une œuvre d’art qui permet d’accéder à son sens. Cela a été repris par Carl Jasper, puis par Sigmund Freud. En psychologie, l’empathie est la capacité à ressentir les émotions, les sentiments d’une autre personne ou de se mettre à sa place. Cela nécessite un effort de compréhension intellectuelle, mais tout en excluant la confusion de soi et de l’autre. L’empathie n’implique pas de partager les sentiments ou les émotions de l’autre, encore moins de prendre position, contrairement à la sympathie ou à l’antipathie. En philosophie, cela désigne l’appréhension immédiate de l’affectivité d’autrui.

L’empathie, de fait, est devenue un lieu de dialogue et de conflit central des différentes disciplines classiques des sciences humaines. L’empathie se retrouve au cœur des problèmes théoriques, cliniques et politiques. Elle est reprise dans l’herméneutique par Dilthey, dans la phénoménologie par Husserl, reprise et redécouverte par la psychanalyse surtout dans l’approche de Ferenczi.

Comprendre l’empathie comme co-sentir ! Des modèles politiques actuels proposent des programmes organisés autour de cette notion d’empathie. Je m’en méfie particulièrement. De même que sans cette conception, nous pouvons vite arriver au totalitarisme !


Je me souviens de cette question, une cité a-t-elle besoin de ponts ou de murs ?

La réponse vous la connaissez bien sûr. Alors quel lien avec l’empathie ?

Compassion et empathie, pourquoi ce sujet de réflexion ?


Il y a quelques années de cela une infirmière qui venait en séance me disait : « Ma chef de service m’a dit : « vous savez Michelle, dans notre métier il faut faire preuve de compassion et d’empathie » », et celle ci choquée de me dire, « Mais je sais bien pourquoi les patients sont là, moi je me dois de faire au mieux mon travail, d’être la plus professionnelle, sans compassion ni empathie. »

Cette réponse peut surprendre. Non seulement elle est pleine de bons sens  mais me semble être une approche simple face à la morale.

Aux psychanalystes que je forme, je les mets en garde dès le départ de la formation à ne jamais faire preuve de compassion ou de d’empathie, mais de neutralité bienveillante. Cela est beaucoup plus difficile, car oblige à avoir trouvé un équilibre personnel minima, suffisant pour prendre en charge la quête analytique de l’autre.

S’il y avait compassion ou empathie, sans l’activité ou l’expression silencieuse du psychanalyste, cela conduirait instantanément la cure à son échec.

Et puis, sur un plan sociétal, imaginons une nation pleine d’empathie et de compassion face au monde qui  nous entoure ! Comprendre la peine d’autrui, la prendre en considération l’assumer par altruisme ! N’est ce pas vendre son âme au diable dans la dislocation de son identité ?


Alors ces deux termes que calent t-ils ?


Enormément de réflexions quant à ce qui relève de la morale, celle ci est relative. La morale dépend de l’histoire, de la culture, de la religion, de la destinée familiale. La morale ne peut être que personnelle.

La philosophie à travers ses disciplines nous ouvre à une lecture de l’humanité. La morale en fait partie. C’est elle qui a porté l’homme dans sa destinée de compréhension et de respect mutuel. Empathie et compassion en sont deux piliers incontournables, autour desquels il faut continuer à alimenter cette réflexion de l’être.

Mais il ne faut pas être prisonnier de mots qui peuvent rendre, le sujet aliéné, s’il n’a pas la capacité à faire face avec la morale.


« La philosophie n’est rien d’autre que l’amour de la sagesse. »  Cicéron.





dimanche 8 avril 2012

La jalousie


La jalousie



C’est un sujet qui m’a été demandé à plusieurs reprises; passionnant, courant, connu, plus ou moins compris, mais dans tous les cas extrêmement complexe. Je dissocie dès le départ de cet exposé la jalousie de la notion d’envie que je développerai ultérieurement.

Je distinguerai trois formes communes de jalousie :

- Celle, très commune, qui est la jalousie amoureuse ou sentimentale , la plus « répandue »   qui fait que l’on oublie qu’il existe d’autres formes insidieuses.

                      - Celle, plus diffuse, que je qualifierai de sociale, que nous vivons au quotidien, à la fois victime ou agresseur.

                     - Celle, plus politique, structurelle, qui va s’appuyer sur la notion de classes. J’ai pris le parti de l’intégrer dans cette approche, même si certains ne l’auraient pas associée.

Quelques généralités :

Communément, nous pouvons dire que la jalousie est essentiellement une émotion que nous pouvons qualifier de secondaire, en ce sens qu’elle n’appartient pas directement à la même catégorie que la peur, la colère, etc. Elle est presque plus élaborée ! Cette émotion peut représenter des pensées et sentiments négatifs, essentiellement d’anxiété, dus à la perte des repères personnels. Elle évoque surtout une peur qui génère dans l’instant une insécurité insupportable.

Cette combinaison d’émotions va organiser un cocktail extrêmement explosif combinant de façon souvent aléatoire la tristesse, le dégout, la peur, et essentiellement la colère qui en est l’expression première.


La jalousie peut et doit être malheureusement, globalement, associé à une forme de paranoïa, qui n’est pas aussi bégnine que l’on voudrait bien le penser. Nous pouvons dire du paranoïaque, qu’il raisonne juste mais sur des prémisses affectives fausses. Je vous mets au défi de rivaliser avec un paranoïaque, son raisonnement extrêmement structuré et précis l’emportera sur toute votre science dialectique. Pour des raisons simples il a ressassé dans les moindres détails depuis, des jours, des mois le petit détail auquel il va savoir donner du sens, excluant simplement ce que la raison va exprimer. Son raisonnement sans faille n’en est pas un. C’est dans la réalité ce que nous nommons un délire.


Digression à ce sujet.

Comment distinguer ce qui relève d’un trait de caractère paranoïde, d’une névrose paranoïaque, d’une psychose paranoïaque ? J’en reste sur le terrain de la psychanalyse qui différencie les trois, et parle d’amplitude et de profondeur historique du symptôme. En effet, comment et qui pourrait nier l’aspect génétique de la personnalité ? Il existe donc des traits innés paranoïdes qui ne vont d’ailleurs pas développer de pathologie observable, ceux-ci sont au quotidien : simplement une propension à la méfiance, plutôt que par exemple à la confiance, mais n’obère en rien la vie quotidienne.

La « névrose paranoïaque » est plus handicapante, car ces prémisses affectives fausses place le sujet dans une écoute extrême, à la vérification de ce que son affect lui impose. C’est une souffrance constante au quotidien, que le sport, entre autre, permet d’apaiser par évacuation des surcharges d’adrénaline. Le sujet est conscient mais dépendant de sa souffrance.

Quant à la psychose paranoïaque, elle est totalement imprévisible, totalement inconsciente, d’une violence inouïe sur le terrain fantasmatique. Le sujet à ce stade est dangereux pour lui même et pour les autres, relève de l’urgence psychiatrique, assujetti qu’il est, à ce toujours présupposé affectif qui le coupe de toute réalité.

Digression tout simplement pour dire que la jalousie relève aussi de ces trois stades et qu’elle peut malheureusement être gravissime. J’ai vu cela en consultation avec une forme sévère qui a nécessité hospitalisation sous Haldol.

Nous pouvons distinguer trois parties en jeu : un sujet, un objet, une angoisse. Selon McDougall (Pour laquelle un hommage a été rendu sur notre site du CSDPA), « La jalousie est une émotion complexe qui sous-entend l’existence du sentiment d’amour. Elle est suscitée de façon exemplaire par le triangle œdipien et constitue une partie du complexe d’Œdipe. ».

Nous pouvons ainsi dire que le sujet (le jaloux) convoitise le bonheur présupposé ou les possessions de l’objet (l’autre sur lequel il a projeté sa paranoïa) C’est important à ce stade de la réflexion de parler des possessions de l’objet car cela va rentrer dans mon développement quant à la jalousie que j’ai qualifiée de sociale ou de politique.


1) La jalousie amoureuse.

La jalousie existe pratiquement dans tous les couples. Il faudrait d’ailleurs définir ce qui peut autoriser la notion de couple, mais c’est un autre sujet. Nous pouvons penser qu’elle est normale lorsqu’elle est modérée, et là encore comment définir la modération ? Cela dépend de la structure psychologique des uns et des autres, du mode éducatif, des valeurs et de la morale des uns et des autres. Certains libertaires pouvant dire : « Tu n’appartiens qu’à toi même et tu fais ce que tu veux de ton corps et de tes sentiments ! » D’autres, pétris de religion notamment, vont considérer que l’objet (le conjoint) ne peut être que la propriété physique, sentimentale et parfois morale du sujet (le paranoïaque) certains allant même jusqu’à dissimuler l’objet !

Vous l’avez compris il s’agit ici d’appréciation mais où et comment poser le curseur qui fait que la confiance est en doute ?

La confiance, quel drôle de gros mot ! La confiance est à la base de toute relation. Nous pouvons considérer que le couple est établi sur la notion de confiance, à priori. Cela veut dire que, par défaut, c’est la valeur qui va animer la gestion de la relation sentimentale.
Malheureusement, la recherche ou l’analyse de soi-disant preuves peuvent créer un nouveau sentiment : la méfiance. Et c’est à partir de là que tout démarre ! C’est souvent à la base une émotion vécue intensément, qui est souvent déplaisante, et souvent interprétée. Je vous ramène au sujet sur « l’interprétation et la projection » en réalité il ne s’agit pas d’interprétation mais de projection et c’est là que le piège se forme ! La méfiance adopte de nombreuses formes : personnelle, relationnelle, sociale et politique.

Quel est le processus d’élaboration ? Au tout début un manque de confiance en soi. Une grande fragilité du Moi qui fait que le sujet manquant d’assurance a besoin d’être, de se réassurer en permanence. L’autre, l’objet fait partie de ce processus, et, sans le savoir, de manière insidieuse, fait souvent parti de ce processus de réassurance.

Le jaloux, vous l’avez compris, est une personne qui manque d’assurance et qui à travers le conjoint va rechercher en permanence les ressources qui vont l’apaiser. Nous entrons dans le mécanisme de la paranoïa, en cherchant de la réassurance nous entrons dans le mécanisme de méfiance ou tout est observable inter/projeter.

Ainsi, le dépassement d’horaire, le téléphone portable sur répondeur, le fameux cheveux blond sur la veste, l’odeur d’un parfum qui vraisemblablement n’existe que dans la tête de celui qui le dit. Tout est inter/projeté !

Quel malheur, le processus est enclenché !  Et rien ne va pouvoir l’enrayer. L’objet, en se justifiant de fautes non commises sera bien évidement hésitant et maladroit dans sa communication, ce qui ne va faire que de renforcer le doute du sujet, et ainsi de suite. À partir de ce moment, la vie devient insupportable, pour la victime et le bourreau. Car ne nous fermons pas les yeux le jaloux est un véritable bourreau tyrannique, harcelant en permanence sa victime qui ne pourra jamais justifier la pseudo interprétation que fait le jaloux.
Ce n’est pas fini ! S’organise autour de cela un scénario, un mode de communication qui va échapper aux deux. La victime et le bourreau vont s’enfermer dans une dialectique qui va échapper à toute raison.

C’est un piège dont on sort mais le parcours est complexe. Les scénarios sont en place chacun sait, connaît la position, la partition. Tout est observé, tout est observable, le conscient et l’inconscient sont activés simultanément en permanence. Si le bourreau souhaite épargner sa victime, lui faire parvenir des signes d’affection, il se met automatiquement dans des jeux perçus ou non par lui « artificiels », la victime les recevant en pleine réalité, et se demandant quelle est la réalité du message. La communication est à ce stade dans un paroxysme de non efficacité, car chacun se retrouve dans les fameux mécanismes de projections/interprétations que j’ai évoqués précédemment.

Comment en sortir ? Quand je travaille en conseil conjugal et donc avec un couple, je propose de changer de mode de communication. En effet comme vous l’avez compris le jaloux/paranoïaque raisonne juste, mais sur des prémisses affectives fausses, il est donc impératif de quitter ce mode de communication verbal ; je préconise donc de choisir celui du corps. Un geste, une caresse, l’expression par un geste de la qualité du message à faire passer.



2)  La jalousie sociale.


Commençons par la plus commune, la plus répandue, insidieuse et dévastatrice, la jalousie familiale. Elle s’exprime à tous les nivaux, tous les échelons, elle est profondément dévastatrice. C’est parfois à cause d’elle qu’ont lieu de nombreux drames familiaux. En effet combien disent « -Ma mère, mon père ou- mes parents ont toujours préféré ma sœur, -mon frère -». Combien ont entendu : « Papa, Maman, t’ont toujours considéré plus que moi. » Qui n’a pas entendu, « Ta tante a de la chance, elle a épousé un homme qui a fait carrière lui », sous entendu, pas comme ton père !

Vous imaginez combien ces situations réelles ou présupposées vont peser sur la donne familiale. Comment les uns, les autres à partir de ces éléments vont consciemment ou non organiser leur relationnel. Cela peut être malheureusement source de drames, qui parfois ont alimenté les chroniques de nos journaux télévisés.

Comment s’en sortir ?  Pratiquant depuis de nombreuses années des thérapies familiales, je dois confesser que les problèmes de communications représentent 80% des problématiques.

 C’est parfois extrêmement alambiqué, non pas de comprendre, de pointer, mais de faire admettre déjà cette photographie. Les chemins ensuite pour la résolution et un réel apaisement existent heureusement mais sont parfois complexes et douloureux .

Mais les solutions existent, il suffit que dans le cadre d’une démarche familiale, que les motivations soient suffisantes, et bien établies entre tous les membres, pour que le protocole de travail s’organise.


L’autre jalousie sociale.

Malheureusement, elle aussi est confuse, diffuse, plus complexe que la précédente. Elle relève de la cours d’école, que nous fréquentons en tant que parent, du boulanger, des commerçants de notre quartier, et puis aussi surtout, pour ceux qui ont la chance d’avoir un emploi, dans nos rapports professionnels.

Avant de ventiler, quelques précisions.

Cette jalousie à priori ne s’apparente pas à la jalousie sentimentale, quoique !

Elle est plus organisée sur le rapport objectal. À savoir ce que moi « sujet » est pour l’autre qui me considère comme un « objet » dans ce cadre « malheureusement » de convoitise.

Dans ce contexte, la convoitise relève de deux natures différentes, l’une d’identité, l’autre des biens qui sont en ma possession.

Cela ce manifeste par quoi ?

 La cour de récré (certains vont croire que j’en fais une fixation … Simplement pour rappeler que c’est un lieu de construction tant pour les enfants que les parents), c’est là où toute la société du quartier, en capacité d’enfanter se retrouve. Choix de l’école publique ou privée sont déjà des déterminants qui classent. Pour ceux qui ont eu la chance de fréquenter ces lieux, nous nous rappelons par exemple des commentaires faits, ou que nous même prodiguons sur ces chères petites têtes. Combien d’entre nous n’ont pas entendu : « Ma fille n’a pas besoin de travailler ça rentre tout seul », « T’as vu il est mal habillé », « Ce n’est pas le dernier de la classe ? ». À cette institutrice qui vous scanne des pieds à la tête, observant que vous sortez d’un brushing coiffeur, que vous avez un nouveau tailleur que votre fils a encore de nouveaux vêtements. Pensez-vous qu’il s’agisse de jalousie … pourquoi en regardant des notes qui ne sont méritées, vous ne comprenez vous pas que cette institutrice est jalouse de vous, ce que vous êtes de êtes, et que votre enfant aura beau faire cela sera comme elle le veut ? (L’institutrice)

Cette jalousie sociale est dévastatrice, elle peut passer par des compliments même pas excessifs qui vont masquer la haine de ne pas être, de ne pas avoir. Elle peut amener à des scenarios d’alliance, de conspiration que nous sujet, à priori ne repérons pas. Rappelons le, la jalousie est une pathologie, et nous ne sommes pas forcément entrainé à en percevoir les rouages, naïfs que nous sommes, de la confiance que nous mettons en l’autre et que nous pensons réciproque !

Sur le plan de la cours d’école, il faut avoir beaucoup de vigilance (sans paranoïa) pour savoir évaluer l’environnement, les alliances réellement objectives ou de circonstance. Cela veut dire développer un sens de l’adaptation suffisant pour accompagner nos enfants, afin que si cela se présentait (une anormalité comportementale qui semble relever de la jalousie), n’en soit pas les victimes.

Sur le plan professionnel, la même attitude de vigilance prévaut. Des collègues, qu’ils soient collaborateurs, supérieurs hiérarchiques, peuvent projeter sur vous de nombreuses illusions. Je pense à cette femme seule, qui a su élever « dignement » ses enfants, progresser à titre personnel, imposer un respect naturel dans sa manière d’être, sa façon de vivre. Eh bien je sais que celle là si en plus son esthétisme est présent, elle va déranger. Si le travail personnel a été suffisant cela ne lui posera aucune gêne, sinon attention ! 

Sur un plan social plus large, le fait d’être simplement un couple, une famille unie peut déranger. Je ne parle même pas des biens matériels qui peuvent dénoter dans la communauté à laquelle sans le savoir j’appartiens, mais cela est le dernier chapitre que je vais développer. L’extension de ma maison par une véranda, le fait que j’aille régulièrement au salon de beauté, ou au club de sport, mon nouveau costume de belle facture, etc. Autant d’objets de convoitise par rapport auxquels, il faut que je sois vigilant !


La jalousie politique


Je sais que c’est une approche qui n’est pas commune, et qui pourra vraisemblablement surprendre certains, mais c’est le développement naturel du chapitre précédent.

Nous y avons vu qu’en fonction, de notre rang, la société nous organise par caste. Il y a des milieux sociologiques auxquels nous appartenons de gré ou de force, pour ne prendre que cette simple réflexion : « Ce sont des parvenus », je pense que tout le monde sait l’avoir entendu, et ce quelque soit notre milieu d’origine.

L’excellent film, « Les enfants du marais » en est l’illustration. Cricri n’aurait jamais pu rencontrer « son futur mari ». Jean Becker nous montre bien combien et comment les classes cohabitent et ne se mélangent pas. Même Jo (incarné à la perfection par Éric Cantonna) n’arrive à assumer sa future position sociale.

Ce film illustre bien la notion de classes sociales. Combien sommes-nous fiers, ou non, d’appartenir à une catégorie sociale. « Mon Père est docker », « il est notaire », « il est commerçant », « ma Mère est médecin ! »

Nous sommes donc construits et structurés dans par et avec cela. Cet objet social dans lequel nous évoluons nous échappe, nous lui appartenons sans le savoir, quoique ! Certains le maitrisent et le cultivent, et le font savoir. Je ne suis pas golfeur, mais combien m’expliquent que cela montre leur réussite sociale et combien me disent : « Le golf, c’est devenu maintenant comme le tennis, il y a de plus de parvenus ! »

Comment se manifeste cette jalousie sociale ?

« Jean, ne sort pas avec Etienne, c’est le fils du notaire 
-Mais Maman, c’est mon ami en classe !
-0ui mais ne vas pas chez lui, ne l’invite jamais à la maison, nous ne sommes pas du même monde. »
Je n’avais jamais imaginé que nos appartenances nous empêcheraient de partager des moments simples. Aussi, comment imaginer qu’Etienne est jaloux de moi ? Du fait que mes parents m’autorisent à faire du vélo avec mes copains du quartier, que je peux aller dormir chez mes amis, que nous partions en vacances sous la toile en famille et en camping !  Je l’ai su bien plus tard lorsqu’au cours de nos études supérieures dans un tonus nous avons pu échanger de cela.

Alain fils d’ouvrier, son père est chef d’équipe, toute la famille est fière de ce parcours, mais revendique son appartenance à la classe ouvrière.  Émile Zola a su mettre en exergue cette noblesse de la classe ouvrière.

Doit on être jaloux des classes sociales « supérieures » ?

J’ai toujours considéré notre vie humaine assujettie au principe de l’entropie, ce qui revient à dire que nos enfants sont, par cette force vitale, amenés à nous dépasser. Cela s’appelle la transmission. Nous sommes ici, dans nos vies, comme toutes les espèces y compris végétales pour transmettre à nos descendants tous ce que nous avons appris, et ainsi faire que nos enfants puissent nous dépasser.

Ainsi la république permet à des enfants d’ouvriers d’accéder à de hautes fonctions et permet aussi aux fils et filles de classes « hautement supérieures » de choisir un destin qui n’est pas forcément celui qui était écrit.

Est-ce que l’enfant d’ouvrier qui devient ingénieur obéissait à la jalousie sociale de ses parents ? À vous de dire.


Pourquoi ai-je dissocié dés le début de mon exposé la jalousie de l’envie ?


La réponse s’articule autour de deux axes :

Jalousie et jaloux est ce la même chose ?

Envie et envieux est la même chose ?

Est-ce que le nom et son qualificatif représentent la même signification ?

Bien sur que non ! Et puis la notion de pulsion de vie et mort surtout. Quand un dépressif dit : « J’ai envie », nous savons qu’il est « sauvé ». Cela veut dire que l’envieux est dans la pulsion de mort, alors que l’envie relève de la pulsion de vie. Cela montre aussi les limites de nos modèles théoriques.

« Il y a deux choses auxquelles il faut se faire sous peine de trouver la vie insupportable : ce sont les injures du temps et les injustices des hommes. »
Chamfort