lundi 31 août 2015


                  Une séance avec Alexandre pour expliquer le divan.

                                                                   


                          

     Pour répondre aux nombreuses demandes sur le fonctionnement des séances, j’ai choisi cet exemple que nous appellerons Alexandre.

    Sans rien révéler, bien sûr, les descriptions ne correspondent pas à la réalité, mais la narration relate la réalité du cheminement.
   
    La prise de rendez vous se fait facilement par téléphone, cette personne me connaissait par un ami qui lui avait donné mes coordonnées. Lors du premier rendez vous il savait déjà comment je travaillais et j’ai pu ajuster ce que lui avait assez fidèlement expliqué son ami quand à la méthode. Cela arrive de temps à autre et cette approche facilite la démarche car le futur analysant a pu constater le cheminement de celui qui l’a conseillé et vient à priori acquis et à la méthode et à la nécessité de la démarche.

    Alexandre est un homme grand aux environs d’un mètre quatre vingt. Habillé de vêtements chics mais pas de marques, et plutôt décontractés, à chacune d nos séances il aborde une tenue identique, décontractée mais avec belle allure.

    J’en profite pour détourner un vieil adage « l’habit ne fait pas le moine «  erreur, bien sur que si l’habit fait le moine. Quand je parle du premier rendez vous au cabinet , le moment dans lequel doit s’installer le transfert positif ,le moment où nous proposons de construire l’anamnèse , à ce moment nous voyons ce que le futur analysant nous apporte . L’ensemble de son apparence, sa tenue corporelle, le port de tète le maintien du regard, la nature des expressions visibles figées ou naturelles, et bien sûr la nature de l’habillement. Qui indique dans tous les cas le positionnement social voulu , l’harmonie des matières et couleurs en supposant que le Psy ait quelques qualités à observer cela , mais je vous assure quand quelque chose de cette nature jure cela se voit . L’attitude dans le fauteuil, droit avachi, les jambes statiques, croisées qui bougent, ainsi que le corps.

    Bref tout dans notre apparence parle c’est à la fois conscient , mais aussi inconscient car de nombreuses choses nous échappent soit dans l’intention soit dans la perception que nous donnons à l’autre et qu’il va pouvoir s’approprier .

    Il explique très clairement lors du premier entretien sa problématique. Il est blasé, un profil  à la Jacques Dutronc, il rit de lui des autres, plaisantes, semble être détaché de tout , et surtout de son environnement . Comme si tout lui glissait dessus. Surtout au niveau de l’affect quelque soit la nature de l’information  à laquelle il est confronté ça ne le touche pas l’émeut très peu. Tour semble l’indifférer.

    Il a de même beaucoup de difficultés avec les sentiments. La notion d’amour de tendresse voire même d’amitié ce sont de concepts complexes pour lui qui sont avant tout perçu quasiment de façon intellectuel pour être analysé et intégré dans un comportement sensé être adapté .

    Alors que dans la réalité ce sont dans un premiers temps les émotions, les affects qui se manifestent et qui ensuit du moins espérons le sont passé au crible du conscient et de l’intellect.  Espérant que l’adéquation des deux fournisse la bonne réponse.

   Comme si chez lui cela fonctionnait à l’envers.

   Il en souffre, des années à cacher cela. Au début qu’il a constaté la singularité de ses comportements il a pensé que c’était un plus comme un tait d’humour un plus, mais au fur et à mesure cela s’est révélé être un véritable handicap dont personne ou très peu en connaissaient l’existence. Même sa femme pourtant très proche  n’en percevait la souffrance qui était générée.

   Ce fut la moto qui déclencha tout .

    Pour son anniversaire des quarante cinq ans, sa femme prit l’initiative de proposer à l’ensemble des membres de sa famille de se cotiser pour lui offrir la moto dont il rêvait tant depuis des années. Ce fut chose faite et le jour venu lorsqu’il devina ce qu’il y avait sous ce gros paquet surpris, il fut à nouveau, encore obligé de feindre, le surprise, la joie et l’émotion de tant d’affection familiale. Mais au fond de lui il ne ressentait tristement encore rien. Juste un vague de sentiment, qui dirait « c’est gentil tout cela. »

      C’est ce décalage entre tant d’affection de secret dans la  préparation, et l’inertie de sa réception qui l’a conduit à me consulter.

    Son anamnèse ne montre rien de précis, de particulier, pas de trauma apparent. Une enfance néanmoins rude ses parents étaient agriculteurs, dans une ferme en pleine campagne, un petit village avec l’école là ou il a fait son apprentissage scolaire .La scolarité fut plutôt bonne, car venant  d’u milieu qui ne portait pas forcément aux études il a pu par ses facilités intellectuelles obtenir des diplômes équivalents à un bac plus quatre et était cadre dans l’administration.

    Des parents aimant mais à cette époque et dans ce micro système ça ne se dit pas. On pouvait penser que le problématique venait de là.

                    Eh bien non ce fut le Père noël qui créa les dommages !

    Nous sommes dans les années 1960, Alexandre comme tous les petits garçons de son âge rêve d’un circuit 24 , un circuit électrique avec des voitures des 24h du Mans , c’est ce qui vient de sortir et les catalogues ont profusion de photographies .

    Ses parents lui demandent ce qu‘il veut pour Noel, il ne croit plus au Père noël il a dix ans. Il sait que ses parents n’ont pas beaucoup d’argent les temps sont durs à cette époque pour les paysans. Mais il n’a qu’un grand frère qui a déjà quitté la maison pour un apprentissage de boucherie, ses parents ne voulant absolument pas que les enfants reprennent l’exploitation. Alors il se prend à rêver que pourquoi pas ! Sachant que c’est un enfant qui ne pose aucun soucis, qu’à l’école il n’a que des éloges. Alors peur être que pour une fois rêve et réalité vont se confondre.

    Un jour il vit son père rentrer de la grande ville proche avec un paquet sous le bras qu’il alla cacher vite fait dans le remise où l’on stocke toutes les denrées. Sa conviction est faite c’est le fameux circuit 24 !

    Puis vint le grand jour. Chez Alexandre c’est le matin du 25 au pied du sapin et de la crèche (ses parents sont très croyants) que les cadeaux sont remis .Le gros paquet est là trônant parmi les autres plus petits aucun doute c’est bien pour lui d’autant qu’il est sur son chausson. Alexandre voit le visage de son Papa juste au dessus en face de lui , les yeux pleins de lumière .Celui ci donne le temps du départ ,et se précipite sur le paquet en explose le pauvre papier qui le protège et …

    C’est un pauvre circuit mécanique en ferraille avec un clef pour remonter 5 minables petites voitures en fer blanc tirées par un ressort, c’est bien un circuit mais surtout pas celui des 24h du Mans du catalogue.

    Alexandre se décompose, ses traits se creusent, des larmes sourdent sur son visage et d’un seul coup il pense à son père qui est là au dessus, il lève vite les yeux et instantanément voit celui ci passer de la joie à une infinie déception une grande tristesse. Le Papa a compris, vu, tout de suite l’immense déception d’Alexandre, mais c’était trop tard le mal était fait et les dégâts allaient commencer à résonner et se propager dans son fils.

    Ou comment vouloir faire plaisir, un moment de bonheur simple s’est transformé  en séisme. En Psychanalyse c’est cela que l’on appelle un trauma.

    Nous pouvons parler  parlais de grafcet, c’est ici une addition de faits qui amène à cela. Je reviendrai dans un autre article sur ce concept.

- Le catalogue avec le circuit
- Le rêve d’Alexandre
- Le paquet de papa
- Le visage illuminé du papa avant
- Le choc
- La déception d’Alexandre
- La déception et la peine du papa
- La remise en route d’un système normal.

    Après tout le monde a fait comme si. C’est le conscient qui a repris le contrôle de ce cataclysme émotionnel que ‘l’inconscient a subit les chocs.

    Les conséquences de ce cadeau sont multiples, pour Alexandre, nous allons voir pourquoi comment et de quelle nature, pour le Papa et pour la gestion de sortie de crise.

    Alors bien évidemment que nous ne sommes pas dans le cadre de dommages de guerre ni à lutter entre la vie et la mort mais cela n’obère le mal être d’Alexandre et la prétention de la psychanalyse à le lui résoudre.

    Pour Alexandre une grande déception portée par une tristesse et nous le découvrirons sur le divan beaucoup de colère. Et puis comment faire pour Alexandre pour gérer la tristesse de son père pour le consoler.

    D’ailleurs celui ci dit » j’espère que tu n’es pas trop déçu , le vendeur dans le magasin m’a dit que c’était aussi bien , c’était moins cher mais je suis que cela te plaira « .Et Alexandre de répondre oui ,oui bien sûr c’est bien aussi . Et comme dans toutes les familles, dans toutes ces circonstances l’incident fut clos, où du moins fut classé dans la mémoire comme un évènement somme toute neutre.

    Alors que va t’il se passer ?

    L’extrême déception a généré un très grand sentiment de trahison et de frustration. Ne rien demander ne rien attendre et puis surtout ne rien montrer de ses sentiments avec la culpabilité d’avoir fait autant de peines à ce papa que j’aime et qui m’aime. Cela va se traduire de façon quasi instinctive par l’obligation de ne pas avoir d’envies, de ne rien demander, de e rien montrer .Et ce dans tous les domaine de la vie. Cela n’a pas été pensé cela s’est installé de façon automatique inconsciente.  Alexandre est devenu un enfant blasé, lu  était plein de vie comme l’on dit plein d’entrain s’est non pas éteint mais mis sur un registre de j’menfoutisme , se moquant se dérobant , à tel point que ses parents en avait parlé au médecin qui leur avait conseillé de consulter .

    Ce souvenir n’était pas oublié, il était assez facilement accessible par la mémoire consciente Alexandre en avait parlé dans l’anamnèse mais c’était plutôt neutre et teinté dan son récit d’une pointe d’humour disons caustique. Ce souvenir est réapparu sur le divan assez rapidement au bout de trois ou quatre séances .Nous en avons pris la mesure dés le début.

    A partir de ce moment sans chercher à organiser ou à oriente toutes les séances de divan étaient organisées autour de cela. Quelle pourrait être la nature de ou des abréactions ?

    Ce furent des abréactions qui apparurent de façon désordonnées non hiérarchisables » dans la tristesse, notamment « Oh mon dieu que je suis triste, si triste pourquoi Papa, Maman pourquoi vous m’avez fait ça j’y croyais, je croyais que vous m’aimiez .D’autres plus violentes« Papa pourquoi tu m’as fait ça je ne vaut rien pour toi , moi qui t’aimait tant « .puis d’autres plus modérées , celles ci vont « s’épuiser « progressivement ce souvenir pillistique est vidé progressivement de ses charges par les abréactions , jusqu’au moment où il devient neutre . C’est à dire ne générant plus de modèles effecteurs. Ceux ci étant comment des fixations dans l’affect organisent des conduites névrotiques que nous appelons modèles effecteurs c’est à dire à effet.

    Nous voyons bien que dans toutes ces abréactions pour pouvoir en utiliser le terme il y a l’émergence du souvenir l’émergence de l’émotion et la verbalisation ciblée au protagoniste. C’est ce fameux triptyque dont j’ai parlé.


   Pour Alexandre les souvenirs pillistiques vidés de leurs charges sont devenus des souvenirs de charges nulles, ce sont surtout les comportements névrotiques qui se sont amoindris, jusqu’à disparaître progressivement.

    C’est la fin de l’analyse, quand les abréactions ont fait le travail de « nettoyage » c’est ce que nous nommons la perlaboration qui prend le relai, l’étape ou ensemble analysant et analyste s’assurent de la réalité et viabilité de l’ensemble.


   Pour Alexandre les changements furent rapide, presque brutaux, il en fut même surpris et c’est chez lui en regardant une émission à la télévision qu’il se surpris plein de trouble. Et lui qui état blasé de pratiquement tout, a trouvé , retrouve le chemin de sensations et des émotions .

     Son épouse n’a cessé de vanter le travail que nous avons effectué et m’a d’ailleurs recommandé à plusieurs de son entourage.

    Bien sur cela ne s'est fait pas en un jour malheureusement .Mais nous constatons de façon nettement observable, les charges émotionnelles bouger, le patient se détendre. C’est d’ailleurs souvent l’entourage qui le lui fait savoir, en lui disant « dis donc tu es beaucoup plus détendu, ou tu es moins triste qu’à l’ordinaire, je ne sais pas pourquoi mais ton regard brille » etc.  etc.

    Effectivement quand nous avons mal à une dent nous le savons nous en soufrons mais quand tout redeviens normal nous n’y pensons plus et bien il en est de même pour la névrose , quand celle ci disparaît nous l’oublions et c’est tant mieux ,c’étaient les comportements d’avant !

    Le travail avec Alexandre a duré 6 mois avec des séances de 45minutes hebdomadaires. La fin de l’analyse a commencé lorsque la perlaboration a démarré, et où à ce moment nous avons commencé à espacer les séances.

    J’ai eu des années après des nouvelles d’Alexandre par un membre de sa famille, un neveu, qu’il m’avait adressé et tout fonctionnait au mieux.