vendredi 23 décembre 2011

Brèves de divan 2: Alliance et Fidélité


J’essaye de me concentrer sur le quotidien que je viens d’acheter, mais rien n’y fait. Dans ce restaurant à la table d’à coté, je ne peux échapper à la conversation de mes voisins. Tous les candidats de la campagne y passent, y repassent même avec tous les noms d’oiseaux que cela autorise : « Elle a trahi ses adhérents, c’est  une fausse alliance … »

« Tu parles d’une alliance, tu as vu comment il l’a trahie, il n’est pas fidèle ça n’est que des paroles … etc. »
                                                                                                   
C’est ainsi que cette discussion à laquelle je ne peux échapper me propose cette digression.

La campagne qui s’annonce réveille en nous des termes surprenants « d’alliance » et de « fidélité » que je vais tenter de développer car ce qui s’applique à l’individu peut l’être au groupe, et également à la société.

C’est tout d’abord la notion d’alliance qui m’attire. Faire alliance, quelle drôle d’idée, de concept ! Pour faire alliance, il faut être au moins deux. Le premier engagé c’est moi. Qui suis-je ? Pourquoi aurais-je besoin d’un accompagnement ?

C’est avant tout la notion d’identité qui apparaît. Vous savez, toutes ces cartes dans les grandes surfaces, les commerces, les clubs que je fréquente ou dans lesquels j’exerce une fonction, le parti politique ou le syndicat auquel j’adhère, ma voiture, mon style de vie observable à mes vêtements entre autres, le résultat scolaire de mes enfants, bref tout ce que je suis.

Cela, je l’ai construit, choisi ou voulu. La question de l’identité est celle de ma construction, revendiquée ou non. Que suis-je ? Qu’est ce que je représente aux autres ? Cette forme de conglomérat, c’est ce que je propose aux autres ou que les autres veulent que je sois (cf. la vie est un théâtre) et cela, à un moment donné.

L’identité peut être définie de différentes manières : sur un plan juridique notamment, d’appartenance sociale, mais en l'occurrence ce qui m’intéresse c’est celui qui est là, maintenant.

La notion d’alliance s’appuie sur celle de l’identité, ce que je suis possède des qualités que l’on peut répertorier aussi en suffisance, excès, insuffisance. Dans cet état d’être s’organisent des rapports aux autres qui vont de fait créer des alliances. Que je le veuille ou non, dans l’enfance, sauf danger extrême, il y a alliance avec mes parents et avec ma fratrie.

Peut-on se passer d’alliances ? Jo (qu’incarne Eric Canton dans le film Les Enfants du Marais) peut en être une forme d’expression. Une toute puissance incarnée ou tout du moins comme nous pouvons le croire  peut autoriser des attitudes autocrates qui confirmeraient la possibilité d’une abstinence d’alliance. Mais ne nous trompons pas, Jo termine en prison et brise sa vie.

La vie est donc faite d’alliances voulues ou pas. En fonction de ce que je suis avec mes valeurs, mes références vont donc s’organiser autour de moi de gré ou de force des alliances auxquelles je serais fidèle ou pas. Et bien il en est de même au niveau sociétal où par exemple les partis politiques sont obligés de composer avec la matrice dans laquelle ils évoluent.

Je suis parfois amené à des alliances avec ma grande sœur pour pouvoir sortir jouer avec mes camarades, je fais alliance avec cette grande fille qui terrorise la cour de récré afin qu’elle ne me prenne en supplique.

Nous voyons ici les limites de l’alliance, celle ci peut aller jusqu’à la compromission : à cette fille je peux lui donner mon gouter, un bijou, de l’argent! Mais Diantre jusqu’où va l’alliance ?

Je ne vais pas aborder ici la morale, mais cela y touche pleinement. Certains, sans sens moral, vont organiser l’alliance très loin et d’autres en sont incapables. Vous imaginez tous les développements que je ne vais pas traiter ici.

Vous le voyez, sur un sujet aussi simple nous sommes amenés a côtoyer la théorie de l’alliance qui  constitue la base, l’origine du structuralisme en anthropologie initiée par Claude Lévi-Strauss dans le champ de la linguistique —mais sur cela je reviendrai avec un article plus approfondi car la psychanalyse et Claude Lévi-Strauss ont beaucoup à dire —.

La fidélité se modélise dans le moi le plus intime. Elle est l’égal du mensonge, cela en est une expression constante.

Pour revenir à nos partis politiques en signant un engagement de programme, de réflexions, se pourrait-il que celui qui tient le stylo sait qu’il ne suivra pas ce qui l’engage?

Si c’était le cas … La politique échapperait elle à la morale ?

Et puis nous simplement dans notre vie , l’exemple l’image la plus simple celle de l’union que nous pouvons envisager avec un être qui nous est cher , tout cela repose sur l’idée de la probité que nous développons ou non , certains considèrent qu’une petite aventure n’est que fortune de passage , alors que pour beaucoup d’autres il s’agit d’une trahison , d’une rupture au contrat et donc à l’alliance .

D’ailleurs pourquoi porter à l’annulaire un anneau ? Pour rappeler, car il doit en avoir besoin, que cette notion d’alliance est fragile et précaire.

Quelle est la valeur de la fidélité? Où se place le curseur de la rupture de l’alliance?

Tous les jours, dans notre quotidien, nous sommes amenés, embarqués dans des jeux de séduction plus ou moins affirmés que parfois certains autorisent à aller très loin : un flirt, un déjeuner, ou plus.

Alors qu’en est-il de nos partis politiques? Finalement sont-ils aussi inhumains que nous?

1 commentaire:

  1. Quand un homme politique propose un programme auquel vous adhérez, et qu'il fait alliance avec un autre, on peut se sentir "trahi", bien plus que quand un homme marié planque son alliance dans son portefeuille pour vivre une aventure!
    Histoire vécue...

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