Combien
de fois entendons nous cela dans nos cabinets, combien de fois d’ailleurs cela
motive une démarche chez le psy.
Je
pense que nous pouvons en appréhender trois axes qui ne sont pas de même
nature :
- L’un historique.
-
L’autre conjoncturel.
- Le
dernier plus philosophique.
- L’axe historique reprend simplement les
principes de la psychanalyse, à savoir la façon dont je me suis construit se
rejoue, à travers des comportements répétitifs plus ou moins conscients, plus
ou moins maîtrisés. Ainsi vont donc se proposer à nous adulte à l’approche de
la rentrée professionnelle, sociale, les réminiscences de celles que nous avons
connu enfant. Pour certains cela sera la "joie" de retrouver des
lieux , des amis , des têtes , des challenges, et pour d’autres de retrouver
le mal de ventre, l’envie de vomir, des difficultés à l’endormissement .
Ces
entrées scolaires ont beaucoup plus d’importance que nous parents nous leur accordons,
limitant notre vision souvent à la perte de l’être cher pour les premières
entrées en maternelle notamment. En réalité chaque rentrée est un rite de passage.
L’entrée en maternelle bien sûr, puis surtout l’entrée en CP, où l’enfant quitte
le maternage de la petite enfance pour percevoir celui de la productivité que
l’on va lui demander, il faudra avoir de bons résultats de bons classement et
nous voyons des petits de 6 ans totalement effarés de cette pression qui peuvent
s’enfermer dans des comportements anxiogènes handicapants.
L’entrée
au collège puis au lycée en est autant. Nous sommes donc façonnés par ces
expériences et même si la raison, ce conscient, qui veut nous faire aller de
l’avant en positivant chaque rentrée professionnelle, nos vieux démons
reviennent au galop et peuvent ainsi s’organiser des peurs indéfinissables, et
ce qui est pire de véritables angoisses paralysantes filles de celle de nos
enfants introjectés.
Pour revenir à nos souvenirs de rentrée, il faut remarquer que
les enfants de nature anxieuse, angoissée, souffrant d'une mauvaise estime de
soi, sont plus effrayés par cet évènement. Ces individualités plus vulnérables
régissent moins bien des obligations de performances, ce qui peut amener
rapidement des difficultés d'apprentissage ou de concentration. L'approche
relationnelle avec les camarades d'école, ou les professeurs va ainsi devenir
des freins et non pas des soutiens et encouragements. Ainsi un sentiment d'insécurité ou d'angoisse s’installe
et peut ne pas quitter l’enfant.
Si ce modèle effecteur est le notre nous ne pourrons pas
échapper au coté et caractère répétitif de cet élève angoissé que nous étions,
et la meilleure volonté du monde pourra vouloir nous faire minimiser cela mais
… Il y a des limites.
C’est pourquoi je vois certains analysants me dire "mais je ne
comprends pas, mon conjoint a tout pour être heureux dans son travail, à chaque
rentrée c’est la même pantomime, il me fait le coup du mal de tête de ventre, d’angoisses,
ne dort plus" …
- L’axe conjoncturel.
Rappelons de notre capacité à prendre de grandes résolutions
l’année prochaine je repeindrai la cuisine, j’aurai mon bac j’irai fleurir la
tombe de tante Estelle. Celles du jour de l’an imprégné d’effluves du réveillon
sont pleines de solennité mais aussi pleines de vapeurs et de brouillard, alors
cela fait vite parti du folklore, Ça s’oublie. Mais il y en a d’autres qui sont
plus inquiétantes, celles que l’on esquisse un peu en juin, et dont on s’est
tellement persuadé tout l’été qu’en août on gave tout le monde, a la rentrée j’arrête
de fumer, de boire, je fais sérieusement un régime, je fais du zèle auprès de
mon chef pour lui demander une augmentation …
Ces intentions louables, nous le savons sont difficiles à mettre
en œuvre, elles font appel à de la privation, demandent de prendre sur soi, de
renoncer à certaines paresses. Et aussi simple, nous nous mettons en état
psychologique de crainte de ne pas réussir, de décevoir nos proches de ne pas y
parvenir.
J’ai remarqué que nous sommes très structurés par la notion de
rentrée scolaire qui marque une étape, un changement, un tournant, une évolution,
plus que par celle du changement d’année, et qu’il y a un blues quasi naturel
associé à cette période de rentrée.
Et puis aussi la rentrée pour tout être normalement constitué et
relativement équilibré c’est passer d’un état de farniente, entouré souvent
d’êtres chers, dans des activités souvent ludiques, à un état de retour au
travail au social pour retrouver un univers ou l’objectif est la rentabilité,
l’obtention d’un diplôme, du permis de conduire etc.
Et c’est rare que la rentrée soit pour ces raisons d’agrément
vital un élément festif.
- L’axe
philosophique.
Je dois avouer que c’est une petite pirouette, mais qui a mon
sens n’en est pas dénuée.
Si je dois rentrer c’est que je suis donc sorti !
Sorti du système, des horaires, du cadre social, des
obligations !
Où fini le monde de la conscience commence celui de l’extérieur.
N’oublions pas que le conscient structure de façon synthétique notre pensée,
notre façon de voir, le conscient façonné d’un surpoids de Surmoi n’a plus de conscience.
Avant la rentrée une forme large de liberté nous permet d’agir
librement, sans contrainte. Pour Kant dont la réflexion est très proche de
celle de Platon à ce sujet, la liberté ne signifie pas indépendance mais autonomie,
c’est à dire la capacité à se donner à soi même ses propres lois. N’est ce pas une
excellente définition de ce que les congés nous apportent ?
Cette période particulière que nous offre les vacances surtout celles
de l’été permet de retrouver l’homme dans son état le plus naturel, d’ailleurs
pour certains dépouillés de tous vêtements pour un retour à la nature, au
rythme des marées, des cycles lunaires.
Le mythe de l’homme sauvage a d’ailleurs fait couler beaucoup d’encre.
La rentrée porte en
elle même cette appellation bien singulière, assez joué il faut rentrer !
Rentrer dans le rang, dans le moule, dans la classe, dans le bureau,
à l’usine !
Bref tout sauf dehors. Nous avons tous en nous un aspect
libertaire propre à nos premiers instincts grégaires alors quand la cloche de
la rentrée a sonné, il faut remettre l’uniforme !
Alors si votre enfance a été jalonnée de rentrées calamiteuses,
si vous avez juré de perdre 10 kg, d’arrêter de picoler, d’aller fleurir la
tombe de la tante Estelle, et si de plus vous n’aimez pas être enfermé, je vous
conseille une boite de bonbons au miel, ou de trouver un très bon psy !
" De la forme nait l’idée" Gustave Flaubert.
Sous les pavés … La
plage !
Bonjour, très intéressant votre article ! ! !
RépondreSupprimerJ'aime son développement !
En effet, je considère que la rentrée est une étape particulière, mais qu'il faut relativiser !
Dans l'axe philosophique que vous développez, j'aime la phrase : "si je dois rentrer c'est que je suis donc sorti"
Ainsi va la vie !
Enfin tout ça pour dire que les vacances c'est bien, mais qu'il y a toujours une fin ! ! !
Quel plaisir que de ce dire bientôt je suis en vacance !
Au plasir de lire votre prochain article !
L.D