Pour répondre aux nombreuses demandes sur
le fonctionnement des séances, j’ai choisi cet exemple que nous appellerons Alexandre.
Sans rien révéler, bien sûr, les
descriptions ne correspondent pas à la réalité, mais la narration relate la
réalité du cheminement.
La prise de rendez vous se fait
facilement par téléphone, cette personne me connaissait par un ami qui lui
avait donné mes coordonnées. Lors du premier rendez vous il savait déjà comment
je travaillais et j’ai pu ajuster ce que lui avait assez fidèlement expliqué
son ami quand à la méthode. Cela arrive de temps à autre et cette approche
facilite la démarche car le futur analysant a pu constater le cheminement de
celui qui l’a conseillé et vient à priori acquis et à la méthode et à la
nécessité de la démarche.
Alexandre est un homme grand aux environs
d’un mètre quatre vingt. Habillé de vêtements chics mais pas de marques, et
plutôt décontractés, à chacune d nos séances il aborde une tenue identique,
décontractée mais avec belle allure.
J’en profite pour détourner un vieil
adage « l’habit ne fait pas le moine « erreur, bien sur que si l’habit
fait le moine. Quand je parle du premier rendez vous au cabinet , le moment
dans lequel doit s’installer le transfert positif ,le moment où nous proposons
de construire l’anamnèse , à ce moment nous voyons ce que le futur analysant
nous apporte . L’ensemble de son apparence, sa tenue corporelle, le port de
tète le maintien du regard, la nature des expressions visibles figées ou
naturelles, et bien sûr la nature de l’habillement. Qui indique dans tous les
cas le positionnement social voulu , l’harmonie des matières et couleurs en
supposant que le Psy ait quelques qualités à observer cela , mais je vous
assure quand quelque chose de cette nature jure cela se voit . L’attitude dans
le fauteuil, droit avachi, les jambes statiques, croisées qui bougent, ainsi
que le corps.
Bref tout dans notre apparence parle
c’est à la fois conscient , mais aussi inconscient car de nombreuses choses
nous échappent soit dans l’intention soit dans la perception que nous donnons à
l’autre et qu’il va pouvoir s’approprier .
Il explique très clairement lors du
premier entretien sa problématique. Il est blasé, un profil à la Jacques Dutronc, il rit de lui des
autres, plaisantes, semble être détaché de tout , et surtout de son environnement
. Comme si tout lui glissait dessus. Surtout au niveau de l’affect quelque soit
la nature de l’information à laquelle il est confronté ça ne le touche pas l’émeut très peu. Tour semble l’indifférer.
Il a de même beaucoup de difficultés avec
les sentiments. La notion d’amour de tendresse voire même d’amitié ce sont de
concepts complexes pour lui qui sont avant tout perçu quasiment de façon
intellectuel pour être analysé et intégré dans un comportement sensé être
adapté .
Alors que dans la réalité ce sont dans un
premiers temps les émotions, les affects qui se manifestent et qui ensuit du
moins espérons le sont passé au crible du conscient et de l’intellect. Espérant que l’adéquation des deux fournisse
la bonne réponse.
Comme si chez lui cela fonctionnait à
l’envers.
Il en souffre, des années à cacher cela.
Au début qu’il a constaté la singularité de ses comportements il a pensé que
c’était un plus comme un tait d’humour un plus, mais au fur et à mesure cela
s’est révélé être un véritable handicap dont personne ou très peu en
connaissaient l’existence. Même sa femme pourtant très proche n’en percevait la souffrance qui était
générée.
Ce fut la moto
qui déclencha tout .
Pour son anniversaire des quarante cinq
ans, sa femme prit l’initiative de proposer à l’ensemble des membres de sa
famille de se cotiser pour lui offrir la moto dont il rêvait tant depuis des
années. Ce fut chose faite et le jour venu lorsqu’il devina ce qu’il y avait
sous ce gros paquet surpris, il fut à nouveau, encore obligé de feindre, le
surprise, la joie et l’émotion de tant d’affection familiale. Mais au fond de
lui il ne ressentait tristement encore rien. Juste un vague de sentiment, qui
dirait « c’est gentil tout cela. »
C’est ce décalage entre tant d’affection
de secret dans la préparation, et
l’inertie de sa réception qui l’a conduit à me consulter.
Son anamnèse ne montre rien de précis, de
particulier, pas de trauma apparent. Une enfance néanmoins rude ses parents
étaient agriculteurs, dans une ferme en pleine campagne, un petit village avec
l’école là ou il a fait son apprentissage scolaire .La scolarité fut plutôt
bonne, car venant d’u milieu qui ne
portait pas forcément aux études il a pu par ses facilités intellectuelles
obtenir des diplômes équivalents à un bac plus quatre et était cadre dans
l’administration.
Des parents aimant mais à cette époque et
dans ce micro système ça ne se dit pas. On pouvait penser que le problématique
venait de là.
Eh bien non ce
fut le Père noël qui créa les dommages !
Nous sommes dans les années 1960,
Alexandre comme tous les petits garçons de son âge rêve d’un circuit 24 , un
circuit électrique avec des voitures des 24h du Mans , c’est ce qui vient de
sortir et les catalogues ont profusion de photographies .
Ses parents lui demandent ce qu‘il veut
pour Noel, il ne croit plus au Père noël il a dix ans. Il sait que ses parents
n’ont pas beaucoup d’argent les temps sont durs à cette époque pour les
paysans. Mais il n’a qu’un grand frère qui a déjà quitté la maison pour un
apprentissage de boucherie, ses parents ne voulant absolument pas que les
enfants reprennent l’exploitation. Alors il se prend à rêver que pourquoi pas
! Sachant que c’est un enfant qui ne pose aucun soucis, qu’à l’école il n’a que
des éloges. Alors peur être que pour une fois rêve et réalité vont se confondre.
Un jour il vit son père rentrer de la
grande ville proche avec un paquet sous le bras qu’il alla cacher vite fait
dans le remise où l’on stocke toutes les denrées. Sa conviction est faite c’est
le fameux circuit 24 !
Puis vint le grand jour. Chez Alexandre
c’est le matin du 25 au pied du sapin et de la crèche (ses parents sont très
croyants) que les cadeaux sont remis .Le gros paquet est là trônant parmi les
autres plus petits aucun doute c’est bien pour lui d’autant qu’il est sur son
chausson. Alexandre voit le visage de son Papa juste au dessus en face de lui ,
les yeux pleins de lumière .Celui ci donne le temps du départ ,et se précipite
sur le paquet en explose le pauvre papier qui le protège et …
C’est un pauvre circuit mécanique en
ferraille avec un clef pour remonter 5 minables petites voitures en fer blanc
tirées par un ressort, c’est bien un circuit mais surtout pas celui des 24h du
Mans du catalogue.
Alexandre se décompose, ses traits se creusent,
des larmes sourdent sur son visage et d’un seul coup il pense à son père qui
est là au dessus, il lève vite les yeux et instantanément voit celui ci passer
de la joie à une infinie déception une grande tristesse. Le Papa a compris, vu,
tout de suite l’immense déception d’Alexandre, mais c’était trop tard le mal
était fait et les dégâts allaient commencer à résonner et se propager dans son
fils.
Ou comment vouloir faire plaisir, un
moment de bonheur simple s’est transformé
en séisme. En Psychanalyse c’est cela que l’on appelle un trauma.
Nous pouvons parler parlais de grafcet, c’est ici une addition de
faits qui amène à cela. Je reviendrai dans un autre article sur ce concept.
- Le catalogue
avec le circuit
- Le rêve
d’Alexandre
- Le paquet de
papa
- Le visage
illuminé du papa avant
- Le choc
- La déception
d’Alexandre
- La déception
et la peine du papa
- La remise en
route d’un système normal.
Après tout le monde a fait comme si.
C’est le conscient qui a repris le contrôle de ce cataclysme émotionnel que
‘l’inconscient a subit les chocs.
Les conséquences de ce cadeau sont
multiples, pour Alexandre, nous allons voir pourquoi comment et de quelle
nature, pour le Papa et pour la gestion de sortie de crise.
Alors bien évidemment que nous ne sommes
pas dans le cadre de dommages de guerre ni à lutter entre la vie et la mort mais
cela n’obère le mal être d’Alexandre et la prétention de la psychanalyse à le
lui résoudre.
Pour Alexandre une grande déception
portée par une tristesse et nous le découvrirons sur le divan beaucoup de
colère. Et puis comment faire pour Alexandre pour gérer la tristesse de son
père pour le consoler.
D’ailleurs celui ci dit » j’espère
que tu n’es pas trop déçu , le vendeur dans le magasin m’a dit que c’était
aussi bien , c’était moins cher mais je suis que cela te plaira « .Et
Alexandre de répondre oui ,oui bien sûr c’est bien aussi . Et comme dans toutes
les familles, dans toutes ces circonstances l’incident fut clos, où du moins
fut classé dans la mémoire comme un évènement somme toute neutre.
Alors que va
t’il se passer ?
L’extrême déception a généré un très
grand sentiment de trahison et de frustration. Ne rien demander ne rien
attendre et puis surtout ne rien montrer de ses sentiments avec la culpabilité
d’avoir fait autant de peines à ce papa que j’aime et qui m’aime. Cela va se
traduire de façon quasi instinctive par l’obligation de ne pas avoir d’envies,
de ne rien demander, de e rien montrer .Et ce dans tous les domaine de la vie.
Cela n’a pas été pensé cela s’est installé de façon automatique inconsciente. Alexandre est devenu un enfant blasé, lu était plein de vie comme l’on dit plein
d’entrain s’est non pas éteint mais mis sur un registre de j’menfoutisme , se
moquant se dérobant , à tel point que ses parents en avait parlé au médecin qui
leur avait conseillé de consulter .
Ce souvenir n’était pas oublié, il était
assez facilement accessible par la mémoire consciente Alexandre en avait parlé
dans l’anamnèse mais c’était plutôt neutre et teinté dan son récit d’une pointe
d’humour disons caustique. Ce souvenir est réapparu sur le divan assez
rapidement au bout de trois ou quatre séances .Nous en avons pris la mesure dés
le début.
A partir de ce moment sans chercher à
organiser ou à oriente toutes les séances de divan étaient organisées autour de
cela. Quelle pourrait être la nature de ou des abréactions ?
Ce furent des abréactions qui apparurent
de façon désordonnées non hiérarchisables » dans la tristesse, notamment
« Oh mon dieu que je suis triste, si triste pourquoi Papa, Maman pourquoi
vous m’avez fait ça j’y croyais, je croyais que vous m’aimiez .D’autres plus
violentes« Papa pourquoi tu m’as fait ça je ne vaut rien pour toi , moi
qui t’aimait tant « .puis d’autres plus modérées , celles ci vont
« s’épuiser « progressivement ce souvenir pillistique est vidé progressivement
de ses charges par les abréactions , jusqu’au moment où il devient neutre .
C’est à dire ne générant plus de modèles effecteurs. Ceux ci étant comment des
fixations dans l’affect organisent des conduites névrotiques que nous appelons
modèles effecteurs c’est à dire à effet.
Nous voyons bien que dans toutes ces
abréactions pour pouvoir en utiliser le terme il y a l’émergence du souvenir
l’émergence de l’émotion et la verbalisation ciblée au protagoniste. C’est ce
fameux triptyque dont j’ai parlé.
Pour Alexandre les souvenirs pillistiques
vidés de leurs charges sont devenus des souvenirs de charges nulles, ce sont
surtout les comportements névrotiques qui se sont amoindris, jusqu’à disparaître
progressivement.
C’est la fin de l’analyse, quand les abréactions
ont fait le travail de « nettoyage » c’est ce que nous nommons la
perlaboration qui prend le relai, l’étape ou ensemble analysant et analyste
s’assurent de la réalité et viabilité de l’ensemble.
Pour Alexandre les changements furent
rapide, presque brutaux, il en fut même surpris et c’est chez lui en regardant
une émission à la télévision qu’il se surpris plein de trouble. Et lui qui état
blasé de pratiquement tout, a trouvé , retrouve le chemin de sensations et des
émotions .
Son épouse n’a cessé de vanter le travail
que nous avons effectué et m’a d’ailleurs recommandé à plusieurs de son
entourage.
Bien sur cela ne s'est fait pas en un jour
malheureusement .Mais nous constatons de façon nettement observable, les charges
émotionnelles bouger, le patient se détendre. C’est d’ailleurs souvent
l’entourage qui le lui fait savoir, en lui disant « dis donc tu es
beaucoup plus détendu, ou tu es moins triste qu’à l’ordinaire, je ne sais pas
pourquoi mais ton regard brille » etc.
etc.
Effectivement quand nous avons mal à une
dent nous le savons nous en soufrons mais quand tout redeviens normal nous n’y
pensons plus et bien il en est de même pour la névrose , quand celle ci
disparaît nous l’oublions et c’est tant mieux ,c’étaient les comportements
d’avant !
Le travail avec Alexandre a duré 6 mois
avec des séances de 45minutes hebdomadaires. La fin de l’analyse a commencé
lorsque la perlaboration a démarré, et où à ce moment nous avons commencé à
espacer les séances.
J’ai eu des années après des nouvelles d’Alexandre
par un membre de sa famille, un neveu, qu’il m’avait adressé et tout
fonctionnait au mieux.
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